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21 novembre 2015 6 21 /11 /novembre /2015 22:35

Le Qatar devra rendre des comptes

devant l’Organisation Internationale du Travail !

Mardi dernier à Genève, le Conseil d’Administration du BIT a adopté par un vote (35 pour, 14 contre, et 7 abstentions), le principe d’envoyer au Qatar une mission de haut niveau afin d’amplifier la pression sur un gouvernement qui s’illustre depuis plusieurs années dans le fait de bafouer les droits des travailleurs migrants. Cette mission devrait être en mesure de constater officiellement et reporter les nombreuses violations aux normes internationales du travail, notamment celles concernant la lutte contre le travail forcé, l’inspection du travail, les mauvais traitements auxquels sont exposés les travailleurs migrants de ce pays du Golfe, l’absence de libertés syndicales et de droit à la négociation collective.

A la veille de ce CA, le gouvernement Qatari avait tenté une diversion en annonçant une réforme du système dit de la kafala, véritable esclavage moderne pour les travailleurs qui y sont soumis. Entre autres choses, les travailleurs sont toujours exposés, malgré un assouplissement, à l’autorisation préalable de leur employeur et du ministère de l’intérieur pour quitter le pays, ce qui les maintient pris au piège dans une situation s’apparentant à du travail forcé. Par ailleurs, le droit syndical est toujours inexistant dans un pays où 83 % de la population est composée de travailleurs migrants issus de 130 nationalités, sans lesquels l’économie qatarie, assise sur la fructification de la manne pétrolière, ne pourrait tourner.

La manœuvre dilatoire du gouvernement Qatari, soutenu par des gouvernements Asiatiques, d’Amérique du Sud et quelques employeurs peu regardants sur les droits et normes internationales du travail, cherchait à tout prix, à grand renfort de pression et de lobbying, à dissimuler la réalité tragique et le quotidien misérable des travailleurs migrants dans ce pays.

L’annonce tardive de prétendues réformes par le gouvernement Qatari visait à transformer le plomb en or, à rassurer les investisseurs étrangers, notamment les firmes multi-nationales qui interviennent dans la construction des infrastructures nécessaires aux évènements sportifs qui se dérouleront dans les prochaines années au Qatar.

Il est heureux que l’OIT, au terme d’un débat suivi d’un vote majoritaire, fait unique depuis 2001, se soit donnée les moyens de remplir sa mission de contrôle d’application des normes internationales du travail dont elle est la garante.

Cette session du conseil d’administration a également permis d’inscrire à l’ordre du jour des travaux de la conférence internationale du travail pour 2018, puis 2019, l’établissement d’une nouvelle norme contre les violences, notamment celles frappant les femmes, sur le lieu de travail. Le gouvernement français a joué un rôle actif dans l’adoption de cet ordre du jour, qui devrait permettre à l’OIT de se doter, pour son centenaire, d’une nouvelle norme traitant d’un sujet de grande importance pour les droits des travailleuses et des travailleurs de nombreux pays.

Genève, le 12 novembre 2015

Bernard Thibault

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