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1 avril 2010 4 01 /04 /avril /2010 19:53
01-04-2010

Almamy Ibrahima Barry, 65 ans, banquier et économiste guinéen, est candidat aux élections présidentielles guinéennes. Dans cet entretien, il nous livre une esquisse de son programme politique.

 

Almamy Ibrahima Barry : « Revenir au FCFA ? C’est l’une de mes priorités et je défends cette thèse depuis plusieurs années. »

Les Afriques : Vous venez d’annoncer votre candidature aux prochaines présidentielles guinéennes ? Quelles sont les raisons qui vous motivent dans ce projet national ?

Almamy Ibrahima Barry : Il est vrai qu’une importante couverture médiatique a été observée suite à ma dernière conférence de presse à Abidjan, au cours de laquelle j’ai réitéré mon intention de me porter candidat à la prochaine élection présidentielle. Je tiens cependant à vous rappeler que, depuis 2006, j’avais manifesté mon ambition de participer à l’élection présidentielle prévue au terme du mandat du feu président Conté.

« Moi, je ne suis pas un politicien par essence et je le revendique. Je suis un technocrate, spécialiste du développement. »

Ma candidature est une profession de foi dictée par l’ampleur du désastre que subit mon pays. De nombreux compatriotes m’ont sollicité, pour que j’incarne la rupture avec les pratiques opaques des anciens régimes, afin d’être porteur d’une espérance nouvelle et d’un nouveau projet de société. Ces sollicitations ont ceci de particulier, qu’elles ne viennent ni d’une ethnie, ni d’une région, mais, plutôt, de toutes les composantes de la nation guinéenne. Ces compatriotes qui m’ont fait confiance ont fondé leur conviction sur l’expérience de plus de vingt ans que j’ai acquise dans la gestion économique d’une trentaine de pays africains et les hautes fonctions occupées sur la scène africaine.

 

LA : Votre pays est souvent décrit comme un scandale géologique au regard de ses richesses ? Quelles sont les premières réformes que vous jugez indispensables pour transformer les potentialités de votre pays ?

AIB : Ce scandale géologique, dont vous parlez, procède d’un constat évident. Les ressources naturelles ne constituent des richesses que si elles sont exploités rationnellement et si les revenus qui en découlent sont utilisées à des fins d’investissements productifs. Par contre, si ces revenus prennent le chemin des comptes bancaires des sociétés étrangères et de leurs complices guinéens, il n’y aura jamais de développement. C’est pourquoi un des axes prioritaires de mon projet repose sur l’instauration de la bonne gouvernance. Le secteur minier est prioritaire dans mon plan de relance économique. Il faut savoir que, de tous les secteurs moteurs de croissance, le secteur minier est le plus important. Avec près de 15 millions de tonnes par an, il représente 85% des recettes d’exportations et 25% des recettes fiscales.

En ce qui concerne les réformes, elles poursuivront deux objectifs : l’intensification de l’activité minière et le renforcement de la valorisation du produit minier. Pour ce faire, plusieurs mesures devront être prises, notamment la restructuration de l’administration minière, la révision du code minier, la promotion de méga-projets miniers dans les domaines du fer et de la filière aluminium, et la mise en place d’infrastructures nécessaires au développement du secteur (chemin de fer transguinéen, port minier en eaux profondes, électrification). Ces réformes concerneront également l’or, le diamant, l’uranium, mais aussi le pétrole, découvert plus récemment. Toutes ces mesures structurelles et promotionnelles ne pourront être efficaces que dans un environnement de stabilité politique, économique et sociale. Les investisseurs sont parfaitement conscients du potentiel minier. A nous de leur offrir un environnement des affaires où leurs droits seront garantis.

 

LA : Ce processus passera-t-il par la révision des contrats miniers signés avec les multinationales occidentales et les compagnies chinoises ? Quel regard portez-vous sur les concessions en cours ?

AIB : Mon objectif principal n’est pas fondamentalement de remettre en cause des contrats signés, mais je m’assurerai de la juste rémunération de l’exploitation de nos ressources. Je rassure donc les investisseurs miniers, la révision éventuelle de certains contrats se fera dans le cadre d’un partenariat gagnant-gagnant et dans le respect des intérêts respectifs de chaque partie. Je pourrai me prononcer plus largement sur ces contrats quand j’aurai pris connaissance des clauses et contreparties qui les composent et obtenu les conclusions des conseils. Je ferai appel à l’expertise africaine et internationale pour nous assister dans ce domaine, qui requiert une haute technicité. Je note simplement qu’il y a beaucoup d’opacité autour de ces contrats de concessions, et cela alimente fortement le débat sur la corruption en Guinée.

 

LA : La Guinée dispose de sa monnaie nationale, héritage de l’époque de Sékou Touré. Pensez-vous que cette option est pérenne à l’heure de la construction des grands ensembles ? Faut-il revenir au FCFA ?

AIB : Revenir au FCFA ? C’est l’une de mes priorités et je défends cette thèse depuis plusieurs années. La Guinée mène une politique monétaire souveraine, depuis 1960, qui a profondément contribué à l’instabilité monétaire et économique du pays. Notre développement économique doit être soutenu par une monnaie stable et une orthodoxie financière, pour mettre fin aux dérives de la Banque centrale. Dites-moi… Comment peut-on concevoir qu’un président de la République puisse se rendre personnellement au siège de l’institution pour se servir des devises disponibles ? C’est tout simplement inacceptable.

La Guinée doit absolument renouer avec la bonne gouvernance en observant les standards internationaux en matière de gestion économique et monétaire. La réforme du système monétaire et bancaire doit nécessairement passer par une adhésion à la zone UEMOA et l’adoption du franc CFA. Par ailleurs, la Guinée appartient à un espace politique et économique où elle sera appelée à jouer un rôle déterminant. L’intégration monétaire, une fois réalisée, élargira ses perspectives économiques et renforcera son poids dans la sous-région.

Je ne rappellerai jamais assez que la réussite de notre intégration régionale sera déterminante pour l’émergence de nos économies.

 

LA : L’armée a toujours joué un rôle de premier plan en Guinée. Y-a-t-il des garanties qu’elle ne sorte pas de sa réserve pour soutenir un des candidats ?

AIB : Je pense qu’il faux positiver. Depuis les accords de Ouaga, la junte militaire a affiché une volonté manifeste de rester neutre dans le processus électoral. Pour l’heure, je m’en tiens aux déclarations de bonne intention du général Sékouba Konaté sur sa volonté de tenir l’armée hors du processus électoral. C’est un homme de parole et je pense qu’il représente une garantie assez suffisante de la neutralité de l’armée dans le processus en cours. Toutefois, il ne faut pas oublier que les soldats sont aussi des citoyens disposant de leur droit de vote. Ils donneront leur voix au candidat de leur choix.

 

LA : Comment vous définir, comparé à vos adversaires Lansana Kouyaté et Sidya Touré ? Etes-vous le candidat technocrate face aux purs politiciens ?

AIB : Je crois que vous touchez du doigt une des raisons principales de mon engagement politique. Après 52 ans de pauvreté insoutenable subie par les populations, la politique politicienne dans notre pays a montré ses limites. Notre classe dirigeante a entretenu des divisions fratricides et profondes au niveau politique, ethnique, générationnel et même institutionnel. Le peuple revendique aujourd’hui un changement radical dans la manière de gouverner le pays et il a conscience de la ferme nécessité du renouvellement du leadership politique. Moi, je ne suis pas un politicien par essence et je le revendique. Je suis un technocrate, spécialiste du développement. A mon sens, il existe un élément déterminant qui me différencie de l’essentiel des leaders politiques, candidats potentiels ou déclarés à la prochaine présidentielle. Je n’ai en aucune façon participé, de près ou de loin, à la gestion calamiteuse des ressources de notre pays. Je me considère donc comme un homme neuf, propre et crédible, capable d’incarner et instaurer le véritable changement auquel aspire la majorité des guinéens.

 

LA : Comment vous situer par rapport à vos adversaires comme Lansana Kouyaté et Sydia Touré ?

AIB : Vous citez Lansana Kouyaté et Sydia Touré. Pourquoi ne citer que ceux-là ? D’autres candidats sont en lice. La liste de ceux que vous appelez mes adversaires est loin d’être exhaustive. Mais, sachez que Kouyaté et Sydia sont d’abord des amis de longue date.

 

LA : Quelles chances donnez-vous au candidat Almamy Ibrahima Barry ? Elu dès le premier tour ?

AIB : Soyons réaliste. Le scénario d’un candidat élu au premier tour est peu probable en Guinée, compte de tenu du nombre de candidats et de l’émiettement de l’électorat. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’Almamy Ibrahima Barry a toutes ses chances d’être le prochain président de la République de Guinée. <

Propos recueillis par Adama Wade

AFP - 01/04/2010 à 21h07
Guinée-Bissau: le Premier ministre arrêté par des militaires, menacé de mort

Des militaires mutins en Guinée-Bissau ont arrêté jeudi le Premier ministre et le chef d'état-major de l'armée, et pris le contrôle de la capitale de ce petit pays pauvre d'Afrique de l'Ouest, plaque tournante d'un important trafic de cocaïne.

Photographe : Francisco Leong AFP/Archives :: Le Premier ministre de Guinée-Bissau, Carlos Gomes Junior, le 16 mars 2010 à Lisbonne
photo : Francisco Leong , AFP/Archives

Les Etats-Unis et le Portugal, ancienne puissance coloniale, ont aussitôt appelé au retour de "l'ordre constitutionnel" dans ce pays, marqué par l'instabilité politique depuis des années, tandis que la France a dénoncé un "coup d'Etat".

Pour sa part, le président du pays, Malam Bacai Sanha, qui n'a pas été inquiété par les mutins, a assuré que la situation était "calme", invoquant une "confusion entre militaires".

Le chef d'état-major adjoint, le général Antonio Indjai, a assuré avoir pris la direction des forces armées, lors d'un entretien téléphonique avec l'AFP. Il a annoncé qu'il voulait faire juger le Premier ministre Carlos Gomes Junior et a menacé de l'"assassiner" si des manifestations en sa faveur ne cessaient pas.

Jeudi matin, des soldats ont interpellé le Premier ministre au siège du gouvernement pour le conduire dans une caserne, avant de le ramener à son bureau puis à sa résidence privée.

 Les mutins ont également arrêté le chef d'état-major de l'armée, le général José Zamora Induta, et une "quarantaine d'officiers".

A la nouvelle de l'arrestation de M. Gomes Junior, plusieurs centaines de personnes --sympathisants du Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap vert (PAIGC, au pouvoir, ex-parti unique)-- se sont rassemblées devant le siège du gouvernement à Bissau pour exiger sa libération.

"Libérez Cadogo (surnom du Premier ministre), nous en avons assez des violences", scandaient les manifestants.

"Je suis en train de perdre patience, si les jeunes continuent encore à occuper les rues, je vais assassiner Cadogo", a assuré un peu plus tard le général Antonio Indjai. "Cadogo est un criminel et il doit être jugé comme tel", a-t-il ajouté.

Auparavant, le général Indjai était apparu devant la presse accompagné par l'ex-chef de la Marine, le contre-amiral José Américo Bubo Na Tchute, accusé de tentative de coup d'Etat en août 2008 et qui était réfugié dans les locaux de l'Onu à Bissau depuis le 28 décembre 2009.

"Il y a eu une situation de confusion. Il y a eu de la confusion entre militaires qui a débordé jusqu'au gouvernement, mais la situation est calme", a affirmé de son côté le président de Guinée-Bissau, Malam Bacai Sanha, sur la radio portugaise Antena 1.

"Nous allons essayer de travailler afin de résoudre le problème qui existe", a-t-il ajouté.

La Guinée-Bissau, au sud du Sénégal, compte 1,5 million d'habitants qui vivent dans la misère. Baigné par l'Atlantique, il est considéré comme un pays de transit pour le trafic de la cocaïne sud-américaine vers l'Europe.

L'armée est très influente dans ce petit pays, indépendant depuis 1974 et ravagé par une guerre civile à la fin des années 1990, et son implication dans le narcotrafic a souvent été évoquée.

Le Portugal a "condamné avec véhémence" les troubles et appelé au "retour immédiat" de l'ordre constitutionnel dans son ancienne colonie.

Les Etats-Unis ont emboîté le pas: "Nous voulons voir l'ordre constitutionnel restauré dès que possible", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine Philip Crowley, qui a souligné que les Etats-Unis étaient "de façon générale contre les coups d'Etat et la violence".

Le ministre français des Affaires Etrangères, Bernard Kouchner, a dénoncé un "coup d'Etat" et la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) des "tentatives de déstabilisation".

Le président de la Commission de l'Union Africaine (UA), Jean Ping, a appelé les militaires à "respecter la discipline républicaine" et à "s?abstenir de tout acte susceptible d?avoir un effet déstabilisateur sur le fonctionnement normal des institutions démocratiquement élues".

 

 
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