LE GRAND SOIR : Comme chaque année, le ministère des relations extérieures de Cuba publie un document sur l’embargo/blocus économique et commercial des Etats-Unis (converti par nos soins en page web et disponible ici sous forme de document pdf).
Comme chaque année, l’Assemblée Générale des Nations Unies condamnera à la quasi unanimité des pays membres l’embargo/blocus des Etats-Unis. Comme chaque année, les Etats-Unis s’en ficheront royalement et remercieront Israël d’avoir voté son soutien à leur embargo/blocus.
Comme chaque année, il s’en trouvera pour prononcer cette phrase rituelle "ouais, mais le blocus n’explique pas tout" tout en étant parfaitement incapables de dire, a contrario, ce que l’embargo/blocus explique.
Pour ceux qui se demandent pourquoi nous écrivons "embargo/blocus", c’est parce qu’il parait qu’il y une bagarre sur le terme à employer... Nous vous invitons à lire ce long document, qui ne laisse entrevoir qu’une partie de la pointe de l’iceberg et de décider ensuite du terme qui vous conviendra le mieux...
Le conflit historique qui a caractérisé les relations entre les États-Unis et Cuba durant plus de deux cents ans s’explique par la prétention des différentes administrations étasuniennes de contrôler les destinées de l’île et la volonté permanente des Cubains de défendre leur droit d’être une nation libre, indépendante et souveraine.
Cette prétention a atteint son apogée au triomphe de la Révolution à Cuba en 1959. Dès lors, toutes les administrations étasuniennes ont utilisé avec des nuances différentes les mêmes instruments politiques pour tenter de la détruire. Le blocus économique, commercial et financier, la subversion et la guerre psychologique, la propagande ont été des outils permanents et systématiques de cette politique.
De par son caractère, le blocus appliqué à Cuba par les États-Unis constitue un acte de génocide aux termes de l’article II c) de la Convention de Genève pour la prévention et la répression du crime de génocide, du 9 décembre 1948, et un acte de guerre économique, selon la définition donnée dès 1909 par la Conférence navale de Londres, dans sa déclaration relative au droit de guerre maritime. Ce blocus continue d’avoir un caractère foncièrement extraterritorial dans la mesure où les sanctions imposées unilatéralement à Cuba on des effets qui s’étendent, hors du territoire étasunien, à des sociétés et citoyens de pays tiers.
L’entrée à la Maison-Blanche d’une nouvelle administration démocrate, censément animée d’une philosophie du changement, n’a même pas signifié en tout état de cause une modification essentielle de cette politique de blocus.
Cuba ne peut toujours pas exporter ni importer librement des produits et des services vers ou depuis les USA ; aucune personne naturelle ou juridique cubaine ne peut utiliser le dollar des États-Unis dans ses transactions internationales ni ouvrir des comptes dans cette monnaie dans des banques de pays tiers ; Cuba ne peut accéder à des crédits de banques des États-Unis, de leurs filiales dans des pays tiers ou d’institutions internationales comme la Banque mondiale, le Fonds monétaire international ou la Banque interaméricaine de développement.
Les lois Torricelli et Helms-Burton, toujours en vigueur, continuent d’empêcher, du fait de leur application extraterritoriale, le commerce de Cuba avec des filiales de sociétés étasuniennes dans des pays tiers, de faire appliquer des sanctions aux hommes d’affaires souhaitant investir à Cuba, d’entraver et de renchérir le transport maritime de marchandises entre Cuba et des pays tiers en interdisant tout cargo touchant des ports cubains ou transportant des marchandises pour le compte de Cuba d’accoster aux USA pour six mois, ou encore en interdisant l’entrée aux USA de tout cargo, même battant pavillon d’un pays tiers, dont l’équipage inclurait des Cubains.
De même, l’administration étasunienne, violant des normes internationales élémentaires, continue de recourir à la subversion politique comme arme de lutte contre Cuba, dégageant pour des programmes de ce genre un budget ayant totalisé 40 millions de dollars pour les exercices fiscaux 2009 et 2010.
Depuis que l’Assemblée générale des Nations Unies a voté, le 28 octobre 2009, la résolution 64/6, l’administration étasunienne a maintenu et renforcé ses principales actions de blocus contre Cuba, ce qui s’est traduit par des sanctions économiques accrues et une intensification de sa traque contre les affaires et les transactions financières cubaines.
Les dommages économiques directs infligés au peuple cubain par le blocus économique, commercial et financier des USA se sont chiffrés, au bas mot, jusqu’à décembre 2009, à prix courants, à plus de 100 154 000 000 de dollars.
Ce montant s’élèverait de 239 533 000 000 de dollars si les calculs étaient faits en prenant pour base l’inflation des prix de détail aux USA, selon le CPI Calculator de l’U.S. Department of Labor, Bureau of Labor Statistics (http://www.bls.gov).
Compte tenu du fait que la valeur du dollar, calculée à partir de la cotisation de l’or sur le marché financier international, a diminué de plus de trente fois de 1961, quand le cours de ce métal était fixé à 35 dollars l’once, à la fin 2009 où il a dépassé les mille dollars, le préjudice total infligé à l’économie cubaine se monterait à 751 363 000 000 de dollars (1).
Le 28 mars 2009, le vice-président des USA, Joseph Biden, qui assistait au Chili au Sommet dit des dirigeants progressistes, a déclaré à la presse que son gouvernement ne lèverait pas le blocus contre Cuba.
Le 7 avril 2009, le porte-parole du département d’État, Robert Wood, a déclaré à un point de presse : « Je pense que nous avons été très clair : nous ne jugeons pas le moment venu de lever l’embargo. »
Le 19 avril 2009, le conseiller d’Obama, David Axelrod, interrogé par la chaîne de télévision CBS pour savoir si la Maison-Blanche avait quelque intention de lever l’ « embargo », répondit : « Nous en sommes loin. »
Ce même jour, le conseiller économique d’Obama, Lawrence Summers, interviewé par la chaîne NBC, affirme au sujet de la levée du blocus : « Ce n’est pas demain la veille. Tout dépendra de ce que fera Cuba. Cuba sait ce qu’elle doit faire depuis longtemps en question de politique, de démocratisation et de mesures à prendre … C’est un point qui sera décidé à partir du comportement de Cuba, »
Il est donc évident que l’administration étasunienne n’a pas la moindre intention de modifier sa politique envers Cuba, ni de respecter les résolutions réitérées de l’Assemblée générale des Nations Unies qui lui demandent de lever son blocus économique, commercial et financier. Au contraire, elle s’entête, faisant preuve d’une ingérence inacceptable, à poser des conditions et des exigences pour modifier sa politique.
Alors qu’il pouvait compter sur un appui politique considérable au Congrès, dans la presse, dans l’opinion publique et parmi les hommes d’affaires, soit un consensus sans précédent dans la société étasunienne face à la politique envers Cuba, ce qui lui aurait permis d’agir avec une grande marge de manoeuvre, le président Obama est resté bien en-deçà des attentes qu’il avait crées dans divers secteurs de la société étasunienne et de la communauté internationale par son discours sur le changement et n’a pas fait jouer ses prérogatives de président pour modifier, même sans l’intervention du Congrès, des aspects significatifs de la politique de son pays.
À supposer qu’il en ait la volonté politique, le président Obama aurait pu, faisant usage de ces prérogatives, assouplir sensiblement le blocus et, sans aucune autorisation du Congrès, émettre une large gamme de permissions autorisant les mesures suivantes :
- Élargir substantiellement les voyages d’Étasuniens et d’étrangers vivant aux USA en interprétant largement les douze catégories de voyages fixées par la loi (2) (par exemple, expansion des voyages éducationnels, des permissions de participation à des conférences professionnelles, des échanges savants, scientifiques, étudiants, culturels, sportives, religieux, autorisation de projets humanitaires, entre autres).
- Supprimer les plafonds fixés aux dépenses associées aux voyages (hébergement, alimentation, transport local) que les Étasuniens et les Cubains vivant aux USA peuvent faire à Cuba (Étasuniens et Cubano-Étasuniens, après amendement de la loi du budget de l’exercice fiscal 2009, ne peuvent pas dépenser plus que la limite fixée aux fonctionnaires de l’administration en voyage à l’étranger, soit 179 dollars par jour).
- Lever la prohibition d’utilisation de cartes de crédit et de débit, de chèques personnels, de chèques de voyageur, émis aussi bien par des banques des USA que par des banques de pays tiers.
- Élargir la liste des aéroports étasuniens autorisés à opérer des vols charters en direction de Cuba (Miami, New York, Los Angeles).
- Permettre des services de ferry entre les USA et Cuba.
- Autoriser toutes les agences de voyages des USA à organiser des voyages à Cuba, ou assouplir les exigences et les démarches en vigueur pour qu’elles reçoivent les autorisations requises (actuellement, environ 150 agences autorisées par des permissions spécifiques).
- Autoriser les voyageurs à Cuba à acheter des produits cubains et à les rapporte aux USA à leur usage personnel ou à titre de cadeaux, et éliminer leur valeur plafond (la seule autorisation concerne les documents d’information, y compris des objets d’art).
- Lever l’interdiction faite aux sociétés cubaines de participer au transport de visiteurs des USA vers et depuis Cuba, et de visiteurs de Cuba vers et depuis les USA.
- Permettre des relations bancaires, telles que des banques correspondantes et l’ouverture de comptes d’organismes cubains sur des banques des USA pour faciliter les exportations agricoles.
- Lever la prohibition qui empêche les bateaux transportant des produits agricoles à Cuba de charger de marchandises dans notre pays, même si leur destination est un pays tiers.
- Élargir la liste des produits qui peuvent être exportés à Cuba de façon à inclure, par exemple, des insecticides, des pesticides, des herbicides, des équipements agricoles, voire des meubles de bois et des confections fabriquées avec des matériaux d’origine animale ou végétale.
- Permettre des formes de coopération plus larges dans la mise au point, la commercialisation et la livraison de médicaments et de produits biomédicaux d’origine cubaine.
- Autoriser l’importation de médicaments et de produits médicaux d’origine cubaine et les paiements correspondant aux exportateurs cubains.
- Autoriser l’exportation de médicaments et d’équipements médicaux qui pourraient être utilisés dans la production de produits biotechnologiques cubains.
- Instruire les représentants étasuniens dans les institutions financières internationales pour qu’ils ne bloquent pas l’octroi à Cuba de crédits ou d’autres facilités financières. - Assouplir ou lever la prohibition imposée à Cuba d’utiliser le dollar dans ses transactions internationales.
- Permettre aux filiales étrangères de sociétés étasuniennes de réaliser différentes transactions avec Cuba, telles que services financiers, assurances, services et investissements (la Loi Torricelli interdisant le commerce de marchandises, mais non lesdites transactions).
- Lever les deux prohibitions établies dans la Loi Torricelli au sujet des cargos : celle qui interdit l’entrée aux USA, durant 180 jours, de bateaux de pays tiers qui auraient transporté des marchandises à Cuba ; celle qui interdit l’entrée dans des ports étasuniens de bateaux transportant des marchandises ou des passagers vers ou depuis Cuba (la loi Torricelli et les réglementations connexes autorisant le président à délivrer des permis dans ce sens).
- Exclure Cuba de la liste des États sponsors du terrorisme international, une liste publiée pour la première fois en 1982, sous l’administration Reagan, et maintenue à ce jour, et qui implique différentes sanctions (3).
1.1 Principales mesures de maintien du blocus adoptées par l’administration étasunienne
Le 11 septembre 2009, le président Obama, se valant d’une relique historique comme la Loi de commerce avec l’ennemi (1917), considérée comme l’une des lois régissant la politique de blocus, fait savoir aux secrétaires d’État et du Trésor que le maintien des sanctions économiques à Cuba relevait de l’ « intérêt national ».
Le 15 novembre 2009, l’agence de presse DPA informe que Mozilla, société qui fabrique le navigateur sur Internet Firefox, a interdit aux usagers de Cuba et d’autres pays soumis à des sanctions de participer à un concours de programmation.
En décembre 2009, on apprend qu’Arturo Valenzuela, secrétaire d’État adjoint aux affaires interaméricaines, a adressé une lettre au sénateur républicain de la Floride, George LeMieux, dans laquelle il souligne que le département d’État continue d’appliquer les sanctions visées au titre IV de la Loi Helms-Burton.
Le 21 janvier 2010, la Commission fédérale de communications (FCC) diffuse un avis public – à partir d’instructions du département d’Etat reçues le 12 courant – pour annoncer que Cuba sera maintenue sur la Liste d’exclusion de la Commission et qu’elle continuera d’oeuvrer en coordination étroite avec lui à l’application de la politique envers Cuba dans ce domaine, et que, malgré les nouveaux procédés instaurés afin que les sociétés étasuniennes puissent demander des licences pour fournir des services de télécommunications à Cuba, elles ne pourront pas faire d’investissements dans l’infrastructure cubaine correspondante.
Le 28 janvier 2010 le site softlibre.barrapunto.com fait savoir que SourceForge, une centrale de mise au point de logiciels qui contrôle et gère plusieurs projet de logiciel libre, a bloqué l’accès à des pays, dont Cuba, auxquels les USA appliquent unilatéralement des sanctions économiques, le site affirmant que cette décision viole deux des prémisses de l’Open Source Initiative (OSI), une organisation qui se consacre à la promotion de logiciels libres : non-discrimination de personnes ou de groupes ; non-discrimination de domaines d’activité.
Le 24 février 2010, réaffirmant le maintien du blocus, le président Obama renouvelle la Proclamation présidentielle 6867 intitulée Declaration of a National Emergency and Invocation of Emergency Authority Relating to the Regulation of the Anchorage and Movement of Vessels, adoptée en 1996, et la Proclamation 7757 de 2004, qui élargit la portée de l’urgence nationale autour de Cuba, afin d’empêcher l’arrivée des bateaux de plaisance étasuniens dans les eaux cubaines, ce qui vise à renforcer le blocus économique.
Le 8 mars 2010, l’Office of Foreign Assets Control (OFAC), rattachée au département du Trésor, annonce de nouvelles réglementations sur les services Internet destinés à Cuba : il est établi un nouveau cadre légal afin que les sociétés étasuniennes et leurs filiales à l’étranger offrent certains services Internet à des individus à Cuba, ce qui n’était pas permis expressément auparavant, dont messagerie instantanée, chat, courrier électronique, réseaux d’interaction sociale, navigation, création de blogs et échanges de photos et de vidéos. Cette mesure ne constitue pas un assouplissement du blocus contre Cuba, car le document de l’OFAC pose clairement que sont interdites :
- L’exportation – directe ou indirecte – de services d’Internet à de hauts fonctionnaires du gouvernement ou du parti cubains.
- L’exportation – directe ou indirecte – de services de connexion à Internet ou d’installations de transmission de télécommunications (telles des liaisons satellite ou des lignes dans ce but).
- L’exportation – directe ou indirecte – de services de serveurs qui ne seraient pas faits pour fournir des communications personnelles et de services d’enregistrement de domaine (ainsi, les extensions net, edu, gov, entre autres).
- L’utilisation des services Internet à des fins commerciales.
Les fonctionnaires de l’administration étasunienne ont reconnu sans ambages les visées subversives de ces mesures.
Tout ceci réaffirme l’angle politique sous lequel l’administration étasunienne manipule la question des communications avec Cuba. La politique de blocus ne s’est pas assouplie non plus dans ce domaine, et il n’existe aucune intention de développer une communication normale avec notre pays. Comme dans d’autres domaines, l’intérêt primordial de l’administration est d’établir des canaux qui facilitent son travail de subversion. Cette réglementation s’applique aussi à d’autres pays auxquels Washington impose des sanctions économiques. L’administration, d’une part, veut éviter que notre pays reçoive les bénéfices provenant de ces activités, et, de l’autre, tente d’influer directement sur les individus dans le cadre de ses visées subversives.
Par ailleurs, en fonction de visées subversives similaires, Cuba doit aussi contrer l’agression radio-électronique en provenance des USA. En violation des normes du droit international, dix-neuf émetteurs de radio et de télévision y émettent sur 30 fréquences plus de 2 000 heures de transmissions par semaine, qui causent des interférences préjudiciables à nos services nationaux et qui en appellent à la violence et à l’assassinat, exhortent les spécialistes et techniciens à déserter et à émigrer, dénaturent et falsifient les faits de la réalité cubaine, stimulent la destruction de l’ordre constitutionnel que le peuple cubain s’est légitimement donné et qu’il a entériné.
Le graphique ci-dessous décrit les fonds alloués par différentes administrations à la guerre des ondes contre Cuba :
Fonds alloués par différentes administrations étasuniennes aux transmissions radiophoniques et télévisées contre Cuba
L’usage hostile des télécommunications dans le but déclaré ou occulte de renverser l’ordre juridique et politique d’un État constitue une violation des normes reconnues à l’échelle internationale et une attitude négative et irresponsable.
The Government Accountability Office (GAO) reconnaît sans ambages dans son rapport de janvier 2010 que le programme de transmissions radio et TV de l’administration étasunienne viole les normes internationales et la législation interne.
1.2 Application extraterritoriale du blocus
L’administration étasunienne a continué de renforcer le caractère extraterritorial du blocus, élevant les sanctions et la traque de citoyens, de dolares d’institutions et d’entreprises de pays tiers qui établiraient – ou se proposaient simplement de le faire – des relations économiques, commerciales, financières ou scientifico-techniques avec Cuba, s’arrogeant le droit de décider de questions qui relèvent de la souveraineté des États.
Le phénomène permanent de fusions et de mégafusions d’entreprises internationales, et les alliances stratégiques à l’échelle mondiale, dans lequel les USA participent au premier chef, a continue d’avoir des retombées négatives sur Cuba et de faciliter la recrudescence de l’extraterritorialité du blocus, dans la mesure où Cuba voit se réduire l’espace économique internationale où elle peut opérer.
La politique d’extraterritorialité repose sur les grandes lignes politiques suivantes : Prohibition aux filiales étasuniennes dans des pays tiers de faire la moindre transaction avec des entreprises cubaines.
- Prohibitions aux entreprises de pays tiers d’exporter aux USA des produits d’origine cubaine ou fabriqués avec des composantes cubaines.
- Prohibition à des entreprises de pays tiers de vendre à Cuba des biens ou des services dont la technologie contiendrait plus de 10 p. 100 de composantes étasuniennes, même si les propriétaires sont des ressortissants de ces pays-là.
- Prohibition d`accès aux ports étasuniens aux navires transportant des produits depuis ou vers Cuba, sous quelque pavillon qu’ils battent.
- Prohibition à des banques de pays tiers d’ouvrir des comptes en dollars à des personnes naturelles ou juridiques cubaines ou de réaliser des transactions financières dans cette monnaie avec des personnes naturelles ou juridiques cubaines.
- Sanctions aux hommes d’affaires de pays tiers qui feraient des investissements ou des affaires avec Cuba : refus de délivrance de visa d’entrée aux USA (y compris, éventuellement, leurs familles) ; actions légales devant des tribunaux étasuniens au cas où lesdites opérations auraient à voir avec des biens réclamés par des Étatsuniens de naissance ou par des Cubains naturalisés ensuite Étasuniens.
On trouvera ci-après des exemples irréfutables de l’extraterritorialité du blocus concernant des sociétés de pays tiers ou installées dans des pays tiers :
- 15 mai 2009. L’OFAC refuse la demande présentée le 16 mars 2009 par Banco Popular Español pour libérer les fonds bloqués d’un virement Madrid-Moscou fait par Cubana de Aviación en décembre 2008 pour un montant de 107 770,95 euros.
- 25 septembre 2009. La filiale de la banque mexicaine à capital espagnol BANCOMER informe la société mexicaine à capital cubain Taino Tours, que l’OFAC a saisi un virement de 25 000 dollars à la ligne aérienne DAMOJH S.A de C.V., à titre de paiement de vol charter. Selon les réglementations du blocus, le département du Trésor est habilité à inspecter les transactions en dollars des banques mexicaines.
- La Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication SCRL (SWIFT), (4) informe Banco Central de Cuba (BCC) que la nouvelle version du SWIFT Alliance Access (SAA), le Release 7.0 a, qu’il faudra forcément utiliser pour accéder au réseau à partir du 31 mars 2012, ne sera pas disponible à Cuba parce qu’elle contient des technologies et des composantes étasuniennes sujettes aux restrictions du blocus économique. La Compañía Lemery du Mexique ayant été rachetée par la transnationale israélienne TEVA à capital étasunien, Cuba ne peut plus continuer d’acheter le cytostatique Dactinomycine, le médicament le plus utile pour traiter les sarcomes (néoplasie maligne qui naît dans le tissu conjonctif, tels les os, les cartilages et les vaisseaux sanguins), qui permet d’élever la survie des patients dans plus de 70 p. 100 des cas.
- Novembre 2009. C’est le mois où la société brésilienne HUHTAMAKI, avec laquelle des relations avaient été engagées depuis un certain temps, devait livrer à Cuba une machine rotative pour emballer des boissons alcooliques dans des verres, d’une valeur de 82 970,3 dollars et d’une productivité attendue de 5 000 unités/h de rhum dans des verres de 60 mm. À la date prévue, HUHTAMAKI informait qu’elle avait été rachetée par la société étasunienne DIXIE TOGA S.A., filiale du groupe Bemis Company INC., et que le contrat avait été annulé du fait de la politique de blocus. Le préjudice s’est monté à 480 000 dollars, car de décembre 2009, date prévue de la mise en marche de la machine, à mars 2010, l’usine a cessé de fabriquer 1 920 000 unités (verre de 60 mm à 0,25 dollar pièce).
- La société anglaise AMETEK a annulé la commande d’achat que lui avait adressée Procurement Customer Services, de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), afin qu’elle vende à Cuba, dans le cadre du projet ARCAL RLA2013 de biosurveillance, un Processeur de signal numérique (DSP) destiné au Centre d’applications technologiques et de développement nucléaire (CEADEN) de l’Agence nucléaire de Cuba, cette technique de fluorescence de rayons X (FRX) devant remplacer l’Analyseur multicanaux Canberra (Série 30) acheté à l’AIEA en 1983 et qui présente de nombreux problèmes à cause de sa vétusté, et devant servir à mesurer les concentrations de métaux lourds dans les biomoniteurs de la pollution atmosphérique de La Havane. AMETEK a argumenté que les dispositions du blocus l’empêchaient de le faire.
- Le 8 décembre 2009, la société cubaine Construimport a passé commande, à travers la société brésilienne SURIMPEX de quinze excavateurs, de vingt rétrochargeuses et de quatre niveleuses (coût estimé : 5,5 millions de dollars), à la société d’origine japonaise Komatsu Brasil Int. Komatsu Ltd, qui a occupé durant de nombreuses années une position de leader sur le marché cubain des équipements de construction, a répondu que la société était une filiale de Komatsu Latin America, établie selon les normes des USA, ce qui lui interdisait de vendre à Cuba.
- SIEMENS du Mexique, après avoir acheté la société mexicaine Fuch, qui avait livré à la société cubaine Antillana de Acero un four à arc électrique, a refusé de vendre des pièces de rechange, sous prétexte du blocus, et d’accomplir ses obligations avec Cuba, qui a dû les acheter en Europe plus cher et avec des délais de livraison accrus.
- En 2009, l’aciérie ACINOX, dans la province de Las Tunas, a cherché des équipements technologiques pour une machine à coulée continue de trois lignes afin d’augmenter la production annuelle de 250 000 tonnes à 300 000 par an. Contactée, la société SVAI de Linz (Autriche), un des leaders mondiaux dans ce domaine, a répondu en juin 2009 que, parce que filiale de Siemens AG, sa maison-mère, qui cotise à la bourse des valeurs de New York, elle doit suivre les clauses du blocus contre Cuba.
- La société aéronautique brésilienne EMBRAER a refusé, arguant du blocus, de vendre des parties et des pièces de rechange pour des avions civils Bandeirante EMB-110 de la compagnie aérienne cubaine Aerocaribbean, S.A., qui a dû dès lors passer par des intermédiaires et payer de 20 à 40 p. 100 plus cher.
- Le département d’État (USA) a refusé un permis d’exportation à la société britannique Pascall Electronics Limited, sous-traitée par la société canadienne Intelcan Technosystems Inc., concernant la vente de l’équipement requis pour modifier (dopplérisation) le radar météorologique MRL-5 de Camagüey. Pascall Electronics Limited a été achetée en 2005 par la société étasunienne de défense et de l’espace EMRISE Co.
- Une banque d’un pays asiatique a fait savoir qu’elle retirait les cartes de crédit aux fonctionnaires de l’ambassade cubaine au nom des dispositions du blocus. L’ambassade a aussi été informée qu’aucune banque de ce pays n’était plus disposée, comme cela se faisait à ce jour, à virer de l’argent à Cuba.
- Une banque européenne, qui fonctionnait comme correspondant en euros d’une banque asiatique, a refusé l’instrument de paiement d’un organisme bancaire cubain et a fait savoir qu’elle ne travaillerait plus pour Cuba parce que celle-ci était inscrite sur la liste des pays parrainant le terrorisme, une liste confectionnée, on le sait, par le département d’État.
1.3 Poursuite du harcèlement et des sanctions contre des personnes physiques et juridiques des USA et d’autres pays
L’administration Obama a maintenu les mesures de blocus conçues par Bush, dont la traque des opérations commerciales et financières de Cuba à l’étranger et des amendes administratives et pénales à des personnes naturelles et juridiques qui en violent les réglementations.
Le maintien de la politique de sanctions contre des sociétés étasuniennes, leurs filiales et des sociétés de pays tiers a tout d’abord un effet immédiat : annulation par les sociétés sanctionnées des opérations ou rupture des liens commerciaux ; mais il a aussi un effet dissuasif sur les sociétés et les individus qui voudraient réaliser des opérations commerciales et financières avec Cuba ; dans le cas des banques, soit elles brisent leurs relations avec notre pays, soit celui-ci doit opérer dans des conditions encore plus précaires.
Les sanctions infligées aux filiales de sociétés étasuniennes à l’étranger et à des sociétés de pays tiers confirment par ailleurs l’extraterritorialité du blocus à Cuba.
En 2009, l’OFAC a infligé des amendes totalisant 315 503 dollars à sept sociétés pour violation du blocus ; soit un total de 340 678 dollars quand on cumule les personnes juridiques et naturelles. Au premier semestre de 2010, les amendes à des sociétés ont déjà totalisé 2 221 671 dollars. L’OFAC a infligé d’autres amendes pour des millions de dollars non seulement par rapport au commerce avec Cuba, mais avec d’autres pays au titre de mesures coercitives unilatérales.
On trouvera ci-dessous des exemples de sanctions infligées à des sociétés des USA et d’autres pays :
Traque et sanctions visant des personnes naturelles et juridiques des USA
- Le 12 mai 2009, la Commission d’échanges des valeurs (SEC) a envoyé une lettre à la société INTEL pour lui demander des informations sur ses affaires avec des pays soumis à des sanctions unilatérales, dont Cuba, à partir d’une dépêche de l’agence de presse AP du 2 mai, selon laquelle les ordinateurs cubains utilisaient des microprocesseurs Celeron qu’elle produit.
- Le 29 mai 2009, l’OFAC a fait savoir qu’elle avait infligé une amende de 35 211 dollars à la société Liberty International Holdings Inc., pour avoir participé comme agent d’assurance d’une affaire liée au gouvernement cubain, ainsi qu’une autre de 1 175 dollars à un individu pour avoir acheté des cigares cubains sur Internet.
- Le 1er juillet de 2009, la société Philips Electronics of North America Corporation, de New York, s’est vu infliger une amende de 128 750 dollars parce qu’un de ses employés s’était rendu à Cuba sans permission pour vendre des équipements médicaux d’une filiale étrangère.
- Le 31 juillet 2009, un individu s’est vu infliger une amende de 15 000 dollars pour des transactions financières avec Cuba ; la société MGE UPS Systems Inc., connue comme American Power Conversion Corporation, une amende de 10 341 dollars pour avoir vendu des régulateurs électriques destinés à Cuba, et la société First Incentive Travel, Inc., une de 8 250 dollars pour avoir prêté des services de voyage à des Etasuniens.
- Le 30 mars 2010, le journal Huffington Post a fait savoir que le FBI avait interrogé une dizaine de membres de la Brigade Venceremos pour avoir voyagé à Cuba. Selon leur avocat Michael Warren, il pourrait s’agir d’une nouvelle directive du département de la Justice.
- Le 1er abril 2010, l’OFAC a refusé au Club de yachting de Sarasota (Floride) le permis de participer à la régate Sarasota-La Havane.
- Le 23 avril 2010, l’OFAC a fait savoir qu’il avait infligé une amende de 21 671 dollars à la société LD Telecommunications Inc., de la Floride, pour transferts de fonds relatifs à des services de télécommunication à Cuba.
Traque et sanctions visant des sociétés de pays tiers
- Le 24 août 2009, l’OFAC a infligé une amende de 5 750 000 dollars au groupe bancaire Australia and New Zealand Bank Group, Ltd., dont la maison-mère est australienne, pour des transactions financières avec Cuba et le Soudan.
- Le 16 décembre 2009, l’OFAC a infligé une amende de 536 millions de dollars au Crédit suisse pour, en violation des dispositions du blocus, réalisé des transactions financières avec plusieurs pays sanctionnés par les USA, dont Cuba, pour laquelle cette banque suisse a géré trente-deux transactions électroniques pour un montant de 323 648 dollars à travers des banques installées aux USA.
- Le 19 mars 2010, l’OFAC a infligé une amende pénale de 2 200 000 dollars à la filiale suédoise de la société chimique Innospec Inc., du Delaware, pour avoir vendu à Cuba un additif d’essence.
Hemingway par du matériel et des intrants en vue de numériser la correspondance et les documents de cet auteur, mais le département du Trésor n’a pas autorisé le virement à Cuba des fonds nécessaires.
EXTÉRIEUR DE L’ÉCONOMIE
3.1 Préjudices causés au commerce extérieur
Les préjudices causés d’avril 2009 à mars 2010 aux entreprises du commerce extérieur se chiffrent a 155 500 000 dollars, une somme inférieure de presque 87 millions (36 p. 100) à celle de la période 2008-2009 (242 400 000 dollars), du fait de la réduction du commerce mondial et des crédits commerciaux entraînée par la crise mondiale. Cela ne signifie pas pour autant que l’impact du blocus ait cédé en intensité et en persistance, tant s’en faut.
Les principaux préjudices causés au commerce extérieur s’expliquent par les facteurs suivants :
- Ne pouvant accéder directement au marché étasunien, Cuba doit recourir à des intermédiaires, ce qui se traduit par un renchérissement des marchandises, l’augmentation des frets et des assurances afin de couvrir des marchés lointains que l’Asie et un manque à gagner pour exportations de biens et services.
- L’augmentation des coûts de financement par suite de ce qu’on appelle le « risque-pays » associé au blocus.
- La prohibition d’utiliser le dollar, ce qui contraint le pays à recourir à d’autres monnaies et à voir ses coûts augmenter à cause des fluctuations des taux de change.
- Le renchérissement des opérations à travers des banques de pays tiers, des commissions bancaires et des modalités des instruments de paiement.
- À partir de mars 2009 et dans les premiers mois de 2010, les USA ont annoncé et mis en oeuvre des directives du président Obama ou des mesures découlant d’initiatives législatives introduites dans des lois votées au Congrès étasunien sur des questions d’intérêt commerciale et connexes.
Toutefois, aucune disposition législative en rapport avec le blocus contre Cuba n’a été modifiée. Seules quelques restrictions ont été assouplies pour l’essentiel, et la cessation des fonds alloués à l’administration pour pouvoir appliquer les mesures adoptées dans le cadre du Trade Sanctions Reform and Export Enhancement Act of 2000 et d’autres mesures extrémistes de l’administration Bush.
L’impact des modifications des réglementations concernant les voyages d’industriels étasuniens du secteur agricole – octroi d’une permission générale – a été réduit par le fait que ceux-ci doivent maintenant fournir des informations données et ne peuvent dépenser au-delà d’un certain plafond quotidien à Cuba, contrairement à ce qui se passait avant.
Aux termes de cette autorisation générale, l’homme d’affaires étasunien doit fournir à l’OFAC deux rapports écrits, le premier deux semaines avant son voyage, où il doit identifier le producteur ou le fournisseur et les activités qu’il réalisera ; le second deux semaines après, pour informer des activités commerciales qu’il a eues, des personnes qu’il a rencontrées et des dépenses qu’il a faites à Cuba.
Ainsi donc, ces mesures d’assouplissement, compte tenu des nombreuses et rigoureuses conditions imposées aux ventes de produits agricoles et sanitaires à Cuba, sont très limitées et clairement insuffisantes.
En 2009, Cuba n’a acheté aux USA aucun produit en rapport avec la santé, tels des équipements et des produits médicaux non jetables, car leur vente était conditionnée à une série de contrôles et d’exigences de vérification sur place qui rendent pratiquement impossible n’importe quelle négociation sur des achats éventuels, à plus forte raison leur concrétisation.
On trouvera ci-dessous quelques exemples des préjudices causés au commerce extérieur par le blocus :
- CONSUMIMPORT, dont les principales importations sont destinées aux secteurs de la santé, de l’éducation et du sport, a systématiquement contacté, sans obtenir de réponse, les principales filiales étasuniennes productrices d’articles de première qualité d’électricité, de sport et de bureau, dont Cooper Wiring Devices (articles électriques), Office Furniture USA (articles de bureau) et UCS INC, déjà mentionnée (articles de sport), si bien qu’il a dû se fournir sur ces marchés tiers et parfois recourir à des intermédiaires, soit 1 900 000 dollars de plus dans le seul cas des articles de sport.
- CUBACONTROL, une société qui importe et prête des services de supervision commerciale pour les produits importés ou exportés vers et depuis Cuba ne peut participer par ses propres moyens, dans les pays où elle est représentée, au marché local dès qu’il s’agit des USA, pas plus qu’elle ne peut encaisser en dollars les services qu’elle prête à l’étranger à des tiers, ni accepter des virements dans cette monnaie de la part de ses agents.
- METALCUBA a présenté une demande de poutres en U et de tubes galvanisés à la filiale d’ASIF ENTERPRISES, des USA, sans obtenir de réponse. Une demande d’offre adressée à la société mexicaine IPESA, à participation étasunienne, a subi le même sort.
3.2 Préjudices causés aux investissements étrangers
Quoique l’investissement étranger soit conçu à Cuba comme un complément des efforts nationaux et s’inscrive dans le principe de sélectivité élevée associée à des projets d’intérêt national à fort impact économique et social, le blocus des USA entraîne de graves conséquences pour les raisons suivantes, entre autres :
- Le pays n’a pas accès à la technologie de pointe qui possèdent des sociétés étasuniennes.
- Les sociétés mixtes à capitaux étranger établies à Cuba n’ont pas accès au marché étasunien afin d’importer ou d’exporter.
- Les projets d’investissements étrangers directs dans le pays n’ont pas accès à des financements en provenance de banques étasuniennes.
- Les sanctions et pressions imposées à des sociétés étrangères entravent la mise en place d’affaires conjointes à Cuba et prouvent le caractère extraterritorial du blocus.
Selon le rapport Investissements dans le monde 2009, publié par la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), les USA restent le premier pays récepteur et émetteur d’investissements étrangers directs (IED).
En Amérique latine et dans les Caraïbes, les entrées d’IED ont augmente de 13 p. 100 en 2008 pour atteindre 144 milliards de dollars, malgré la crise mondiale, avec une augmentation de 29 p. 100 en Amérique du Sud et une réduction de 6 p. 100 en Amérique centrale et dans les Caraïbes, une région directement touchée par la décélération de l’économie étasunienne.
Pour estimer les investissements que Cuba pourrait recevoir en cas de levée du blocus, on a analysé la période 2000-2008 en prenant en considération en tout premier lieu les investissements accumulés reçus par certains pays centraméricains et caribéens dans les différents secteurs économiques et ceux en provenance des USA. Cela a permis de lister les pays à économie comparable à celle de Cuba et aux caractéristiques similaires des points de vue géographique, climatique et socioculturel, qu’ils soient en voie développement ou à développement intermédiaire.
Dans le groupe des pays centraméricains et caribéens aux caractéristiques similaires à celles de Cuba, on a sélectionné le Costa Rica, le Honduras et la République dominicaine, et dans ceux des pays qui sont considérés comme Cuba des pays à développement intermédiaire (PDI) selon le classement de l’Association latino-américaine d’intégration, on a choisi le Pérou, la Colombie et l’Uruguay.
Le tableau ci-dessous indique les investissements étrangers totaux et ceux en provenance des USA reçus par ces pays de 2000 à 2008.
Pays | IED accumulés en millones de dollars(1) | Capitaux accumulés en provenance des USA en millions de dollars (2) | % de participation des investissements USA sur le total (2/1) |
Costa Rica | 6 902 | 3 948 | 57% |
Honduras | 4 057 | 1 752 | 43% |
R. Dominicaine | 8 750 | 3 594 | 41% |
Colombie | 25 839 | 6 465 | 25% |
Perou | 6 107 | 947 | 16% |
Uruguay | 2 087 | 785 | 38% |
Source : Panorama regional de la inversión extranjera directa en América Latina y el Caribe. Comisión Económica para América Latina y el Caribe (CEPAL), 2008.
On peut supposer dès lors que Cuba pourrait recevoir des IED en provenance des USA équivalents à ceux des pays choisis.
Sachant que le pourcentage moyen des investissements en provenance des USA est de 37 p. 100 du total des IED des six pays sélectionnés, Cuba aurait pu recevoir durant la période analysée, si le blocus n’existait pas, environ 2 251 000 000 de dollars en provenance de ce pays.
Si l’on prend comme référence uniquement les pays qui, selon l’ALADI, sont classés comme pays à développement intermédiaire, Cuba aurait reçu environ 26 p. 100 du total d’IED, soit 1 602 000 000 de dollars.
Si l’on prend uniquement les pays centraméricains et caribéens aux caractéristiques similaires à celles de Cuba, celle-ci aurait reçu 47 p. 100 du total, soit 2,9 milliards de dollars de 2000 à 2008.
Dans le pétrole, des sociétés étasuniennes dotées de technologie de pointe pour prospecter en eaux profondes, comme EXXON MOBIL (au 2e rang selon le classement de Fortune Global 500), CHEVRON (6e rang), CONOCO PHILLIPS (10e), VALERO ENERGY (49e) et MARATHON OIL (108e) ne peuvent investir dans l’île à cause des restrictions de la loi Helms Burton.
Le tourisme restant un des principaux moteurs de l’économie cubaine, il faut continuer de le développer en offrant une participation à des investisseurs étrangers dans l’infrastructure hôtelière et non hôtelière, et à la construction de terrains de golf, entre autres activités auxquelles les sociétés étasuniennes de cette branche ayant de forts investissements dans les Caraïbes ne peuvent accéder.
Le marché des terrains de golf en constitue un exemple clair. Il existe dans le monde plus de 81 millions de joueurs de golf qui jouent en moyenne 6,3 fois par mois, selon l’International Association of Golf Tour Operators (IAGTO). Les USA comptent le plus grand nombre d’affiliés, 29 millions, et la plus grande quantité de terrains. À cause du blocus, aucune société étasunienne ne peut investir dans ce domaine.
En gestion hôtelière, des 14 chaînes internationales présentes à Cuba, aucune n’est étasunienne, et le pays ne peut compter des chaînes comme Sheraton, Hilton, Marriot et Holiday Inn, qui font partie des dix meilleures au monde et qui opèrent dans les Caraïbes.
Dans l’industrie agro-alimentaire, Cuba importe tous les ans des USA d’importantes quantités d’aliments. Sans le blocus, il serait possible de constituer des sociétés mixtes pour développer plusieurs de ces produits dans l’île, ainsi que des activités de logistique de ramassage, de traitement, de conditionnement après récolte et de distribution, ce qui contribuerait à la substitution d’importations, à la relance du secteur agricole et à la création de sources d’emplois, entre autres avantages.
3.3 Préjudices financiers et bancaires
Durant la période analysée, le secteur bancaire et financier cubain a continué d’être soumis en permanence à la politique d’hostilité et d’isolement du gouvernement étasunien, ce qui s’est manifesté par l’empêchement d’obtenir des financements extérieurs, par la mise en place d’obstacles à toute opération financière et par l’annulation de négociations commerciales ou financières, même en phase finale.
Chaque année, le blocus réduit les possibilités de recourir à des banques correspondantes en rendant les transactions plus complexes, sans parler des limitations déjà bien connues dans l’utilisation du dollar comme moyen de paiement, ce qui oblige le système bancaire et financier à explorer de nouvelles voies ou des solutions de rechange pour pouvoir continuer d’opérer avec les banques étrangères.
Les préjudices de caractère général causés aux banques et institutions financières cubaines durant la période ont été les suivants :
- Dépenses supplémentaires pour paiement en monnaies différentes de celles du contrat (dollars des États-Unis), ce qui entraîne des risques au titre des parités et renchérit les opérations à cause du double change à réaliser dans ces cas.
- Impossibilité d’ouvrir des comptes en franc suisse sur certaines banques de premier niveau en Suisse.
- Nécessité de maintenir des soldes minimes sur des comptes cubains à l’étranger devant les risques de mise sous séquestre.
- Impossibilité de payer les titulaires de cartes de crédit à leurs lieux de domicile et obligation de les effectuer à travers des banques d’autres régions, ce qui élève les coûts.
- Concertation d’opérations de vente ou d’opérations de financement en des termes peu avantageux, faute d’offres variées disposées à négocier avec Cuba.
- Emplacement de la totalité du collatéral pour confirmation de cartes de crédit non financées, d’où immobilisation de fonds dès leur émission.
- Impossibilité de gérer des envois de fonds de particuliers en provenance de coopérants, d’étudiants latino-américains et de communautés cubaines depuis l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud à cause de la forte influence des USA sur les banques de la région.
- Pressions contre les gestions de crédit extérieurs qui renchérissent les coûts financiers des opérations et obligent les banques cubaines à structurer des financements avec des institutions étrangères, à établir des mécanismes adéquats pour contrecarrer les restrictions découlant du blocus et de l’évaluation du pays en matière de crédit décernée par des agences de qualification qui répondent aux intérêts du capital étasunien.
- Impossibilité pour les banques cubaines d’accéder à des sites d’information financière spécialisée, tel Reuters, considéré l’une des sources les plus complètes. Même si elles recourent à d’autres solutions, cela a des retombées négatives sur les services d’information et d’analyse de marchés qu’offre une des banques du système cubain et qui sont utilisés normalement par de nombreux clients.
3.4 La Section 211 de l’Omnibus Consolidated and Emergency Supplemental Appropriations Act, 1999, et les nouvelles agressions contre les brevets et les marques
Le 6 avril 2010, une juge du district de Wilmington (Delaware) s’est prononcée pour que la société Bacardí puisse vendre aux USA la marque de rhum Havana Club, une marque appartenant légitimement à la société cubano-française Havana Club Internacional et dont l’United States Patent and Trademark Office (USPTO) a refusé de renouveler l’enregistrement en août 2007 au titre de la Section 211 ; la société française Pernod Ricard a annoncé qu’elle interjettera appel de cette décision devant le Cour fédérale d’appel du troisième circuit.
La Section 211, votée par le Congrès étasunien en octobre 1998 dans le cadre de l’Omnibus Consolidated and Emergency Supplemental Appropriations Act, 1998, vise à interdire l’enregistrement et la rénovation de différentes marques cubaines au prestige international reconnu, comme la marque HAVANA CLUB, afin de les usurper.
Voilà maintenant huit ans, cette année-ci, que l’Organe d’appel, de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a ratifié en février 2002 que la Section 211 enfreignait les obligations en matière de traitement national et de traitement de la nation la plus favorisée établie dans l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) et la Convention de Paris sur la protection de la propriété intellectuelle, et a demandé au gouvernement étasunien de renoncer à cette mesure incompatible avec les obligations avec l’Accord précité.
Depuis, les différentes administrations étasuniennes n’ont rien fait pour respecter les obligations que leur imposent les accords de l’OMC et les résolutions de l’Organe d’appel, chacune se bornant à ressasser qu’ « elle travaille avec le Congrès pour mettre en pratique les recommandations et résolutions » de cet organe.
De nombreux membres importants de l’OMC expriment tous les mois devant l’Organe d’appel leur préoccupation devant cet irrespect prolongé des USA et devant les conséquences directes sur les systèmes multilatéraux de commerce et de protection de la propriété intellectuelle.
Permettre à Bacardí de vendre un rhum appelé HAVANA CLUB, une marque reconnue d’origine cubaine, c’est fomenter les pratiques du commerce international les plus déloyales.
Par ailleurs, dans le cadre du blocus et de l’hostilité politique, une nouvelle situation de risque et de nouveaux préjudices s’est générée en 2009 : les intentions de certains de présenter des demandes légales contre l’État cubain devant les tribunaux étasuniens en vue de s’approprier, comme moyen de compensation, des marques commerciales et des brevets cubains.
Il est encore impossible d’estimer les préjudices que cela causerait à des sociétés cubaines titulaires de marques commerciales et de brevets aux USA, au-delà de son effet dissuasif sur des affaires éventuelles.
En février 2010, l’United States Patent and Trademark Office (USPTO) a publié le transfert de 44 marques et de 58 brevets appartenant à des organes cubains en faveur de Nilo Jerez. L’un de ces brevets non seulement n’apparaissait même pas dans la requête exécutive présentée devant les cours fédérales, mais n’avait même pas été concédé à ce moment-là.
Une révision de routine effectuée le 12 avril 2010 sur le site web de l’USPTO a permis de constater que Nilo Jérez restait titulaire assigné des registres des institutions cubaines CIM, CNIC y DALMER.
À partir de juin 2010, la cour fédérale du district Est de Virginie, la cour fédérale du district de Columbia et la cour fédérale du district Sud de Floride doivent se prononcer sur les absurdes demandes d’indemnisations présentées contre Cuba par des parents du mercenaire étasunien Robert Otis Fuller et du Cubano-étasunien Nilo Jérez, qui ont obtenu des verdicts favorables pour plusieurs centaines de millions de dollars de la part de cours manipulées politiquement par des anticubains résident essentiellement en Floride.
Compte tenu de l’impossibilité que leurs demandes soient satisfaites à partir de fonds cubains placés sous séquestre aux USA, mais déjà largement pillés par une longue série de verdicts illégitimes, les demandeurs prétendent le faire au moyen d’une vente aux enchères illégale de marques et de brevets cubains dûment enregistres aux USA. Si ces cours se prononçaient en faveur de ces demandeurs, cela créerait un précédent très négatif pour les relations économiques et commerciales futures entre les deux pays, ainsi qu’une violation des obligations internationales des USA en matière de propriété intellectuelle.
En signant les traités internationaux relatifs à la propriété intellectuelle, notamment la Convention de Paris sur la protection de la propriété industrielle, la Convention interaméricaine sur la protection des marques commerciales et du commerce et l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), de l’Organisation mondiale du commerce, les USA ont accepté, en tant qu’État partie, des obligations juridiquement contraignantes de protéger les marques et brevets des sociétés et institutions de tous les pays, Cuba y compris.
L’administration étasunienne a toute l’autorité requise, en vertu de ses propres lois, d’intervenir dans des procès de cette nature qui touchent ses intérêts nationaux. Les administrations étasuniennes ont légitimé à plusieurs reprises la position d’individus contraires à Cuba qui veulent satisfaire leurs exigences d’indemnisation aux dépens de biens et avoirs cubains aux USA. Ainsi, plus de 170 millions de dollars de fonds cubains mis sous séquestre dans des comptes bancaires de ce pays ont été volés de cette manière et alloués à des familles de membres d’organisations terroristes, d’agresseurs et de mercenaires au service de Washington.
Par contraste, plus de cinq mille marques et brevets étasuniens sont enregistrés à cette date à Cuba, bénéficiant de la longue tradition de respect en matière de propriété intellectuelle suivie par le gouvernement cubain, en accord avec le droit international, dont Mars Incorporated, Procter & Gamble, 3M Company, Merc & Co., Wyeth, Pfizer, E. R. Squibb & Sons, Bayer, Warner-Lambert, G. D. Searle et bien d’autres importantes sociétés étasuniennes.
La tentative de s’approprier des marques et brevet de sociétés cubaines revient à ignorer les accords internationaux relatifs aux marques et brevet et a de sérieuses conséquences commerciales internationales. On connaît pertinemment le pouvoir des marques, seuls avoirs des propriétés intellectuelles qui peuvent rester en vigueur indéfiniment.
Aux termes du droit international, les USA sont responsables de ce que leurs lois, règlements et procédés judiciaires et administratifs soient conformes à leurs obligations par rapport aux accords de l’OMC et aux traités internationaux de marques et brevets auxquels ils sont partie.