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31 mai 2011 2 31 /05 /mai /2011 20:43

 

Prochaine séance :

"Faire ses devoirs" : famille, école, intervenants... qui fait quoi ?

Avec Séverine Kakpo et Patrick Rayou, chercheurs en Sciences de l’éducation, Université Paris 8 (CIRCEFT-ESCOL). Co-auteurs du livre : Faire ses devoirs. Enjeux cognitifs et sociaux d’une pratique ordinaire, Presses Universitaires de Rennes, 2009.

 

Mardi 7 juin 2011 à 19h
Fondation Gabriel Peri
11, rue Étienne Marcel, Pantin (93)
Métro Hoche
Plan d’accès

Entrée libre. Le nombre de place étant limité, merci de vous inscrire par mail à l’adresse inscription@gabrielperi.fr

Les devoirs pour l’école sont un analyseur de ce que l’école attend comme travail « en plus » de ce qui se joue en classe, de ce qu’elle attend des familles. Les difficultés que rencontrent les élèves pour les faire sont révélatrices des malentendus qui freinent souvent les apprentissages. Les aides plus ou moins pertinentes que leur apportent les familles et les intervenants périscolaires renseignent sur les impasses d’une démocratisation qui ne tient que peu compte de ce qui est nécessaire pour apprendre de façon autonome.


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31 mai 2011 2 31 /05 /mai /2011 20:40
 

 Engagement :

   


Rencontre annuelle du réseau européen des centres de soins aux victimes de la torture /  Amsterdam

Présidence européenne du Danemark en 2012 : un espoir pour les centres de soins spécialisés ?

La rencontre annuelle des centres de soins européens aux victimes de la torture a eu lieu du 10 au 12 mai  à Amsterdam. Sibel Agrali, directrice du Centre Primo Levi, Beatrice Hofmann Patsalides, psychologue clinicienne et psychanalyste, et Catherine Pinzuti, responsable de l’accueil, ont participé à cette rencontre. Différents
groupes de travail ont été mis en place autour de la recherche clinique, de la documentation, du plaidoyer, enfin, de la recherche de financements. (Fédération des centres allemands pour les victimes de la torture) et financée par le Fonds européen pour les réfugiés (FER) à laquelle participe l'Association Primo Levi avec les centres Xénion

   
 

Soins et soutien
aux personnes
victimes

de la torture
et de la violence politique

 
 
Lettre de mai 2011
Logo APL

Ensemble pour sensibiliser à la situation des personnes réfugiées ayant subi la torture

Tout au long de l'année, les cliniciens du centre de soins de l'Association Primo Levi sont sollicités pour partager leur expérience, à l'occasion des rencontres organisées par les groupes locaux de l'ACAT ou d'Amnesty international, de colloques menés par des institutions, des universités ou d'autres acteurs de terrain. La semaine dernière, un psychologue clinicien et la juriste de l'équipe sont intervenus à l'Institut régional de travail social (IRTS) qui forme de futurs travailleurs sociaux, où nous avons constaté l'intérêt que portent les étudiants à notre action. La sensibilisation est au coeur de notre action. Et notre colloque bisannuel en constitue sans doute le point d'orgue : un temps fort qui permet d'échanger sur nos pratiques, nos expériences et de croiser les réflexions issues de disciplines diverses. Mi-juin, notre Ve colloque traitera du thème si actuel des rapports entre langage et violence. Des personnalités engagées comme l'historien Benjamin Stora, le magistrat Serge Portelli ou le psychanalyste Michel Plon nous ont fait l'honneur de répondre positivement à notre invitation. Les inscriptions ne sont pas closes : nous vous invitons à venir partager ce moment avec nous. Au plaisir de vous y rencontrer...

                 
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30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 19:53

 

Droit au Logement
Droit Au logement Paris et environs – 24 rue de la Banque - 75002 Paris
tél : 01 42 78 22 00 • fax 01 42 78 22 11 • <http://www.droitaulogement.org/>

COMMUNIQUE
Paris le 27 mai  2011

LA COURNEUVE :
Le Tribunal Administratif rejette la demande de "Plaine Commune"
d’expulser les sans logis de la barre Balzac.

La demande d’expulsion des familles sans logis qui campent sur la place de la fraternité à La Courneuve, déposée par la communauté d’agglomération « Plaine Commune », a été rejetée ce soir par le Tribunal Administratif de Montreuil, au motif de « défaut d’intérêt à agir ».

D’autre part, les expulsés déposent ce soir au TA un référé afin que l’État reprenne l’hébergement des expulsées de la barre Balzac. Une demande d’annulation de l’arrêté d’expulsion pris par le Maire avait été déposée dans la semaine.

Les expulsés demandent dès lors à la Mairie de la Courneuve et à Plaine Commune de mettre des locaux à disposition en attendant que la justice tranche sur cette demande de réhébergement, et d’appuyer leurs demandes de relogement et de régularisation .

Il s’agirait de mettre à l’abri les sans toit,  et de répondre également aux habitants de la Courneuve qui s’inquiètent de voire depuis le 18 avril des femmes et des enfants dormir à la belle étoile, dans des conditions d’extrême précarité.

Cette lutte est emblématique notamment parce que l’État confirme la réduction brutale des places d’hébergement en ile de France, en violation des lois instituant une obligation d’accueil inconditionnelle des sans logis.

Si l’État n’a plus d’argent, qu’il réquisitionne !
C’est moins cher et c’est plus confortable que les chambres d’hôtel à 1000 euros par mois, exigües, précaires et dures à vivre.

Les expulsées de la barre Balzac manifesteront samedi à 14h à Barbès, avec DAL, la CSP, les oubliés du DALO, le comité de soutien, les habitants du 94 rue des Sorins à Montreuil ….contre les politiques racistes et discriminatoires du Gouvernement .

Agenda : Rassemblement devant la Préfecture de Seine St Denis mercredi 1er juin, à partir de 15h

 

Droit au logement : http://www.droitaulogement.org/
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30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 13:18

DEMOCRACIA REAL YA !

Manifeste.
dimanche 22 mai 2011
publié par Christian Maurel

 

Depuis plusieurs jours, des milliers de jeunes, de précaires et de travailleurs espagnols descendent dans les rues de toutes les grandes villes du pays. Leur mouvement, qui s’organise principalement par le biais des réseaux sociaux, est intitulé DEMOCRACIA REAL YA ("Réelle Démocratie Maintenant", http://www.facebook.com/democraciarealya). Plus d’infos sur http://democraciarealya.es/ ; http://tomalaplaza.net/ ; ou encore http://www.facebook.com/SpanishRevolution.

 

Manifeste de « Democracia Real Ya ! »

Nous sommes des personnes courantes et ordinaires. Nous sommes comme toi : des gens qui se lèvent tous les matins pour étudier, pour travailler ou pour chercher un boulot, des gens qui ont famille et amis. Des gens qui travaillent dur tous les jours pour vivre et donner un futur meilleur à celles et ceux qui les entourent

 

 

Parmi nous, certain e-s se considèrent plus progressistes, d’autres plus conservateurs. Quelques un-e-s croyants, d’autres pas du tout. Quelques un-e-s ont des idéologies très définies, d’autres se considèrent apolitiques. Mais nous sommes tous très préoccupé-e-s et indigné-es par la situation politique, économique et sociale autour de nous. Par la corruption des politiciens, entrepreneurs, banquiers, ... . Par le manque de défense des hommes et femmes de la rue.

 

 

Cette situation nous fait du mal quotidiennement ; mais, tous ensemble, nous pouvons la renverser. Le moment est venu de nous mettre au travail, le moment de bâtir entre tous une société meilleure. Dans ce but, nous soutenons fermement les affirmations suivantes :

 

* L’égalité, le progrès, la solidarité, le libre accès à la culture, le développement écologique durable, le bien-être et le bonheur des personnes doivent être les priorités de chaque société avancée.

 

* des droits basiques doivent être garantis au sein de ces sociétés : le droit au logement, au travail, à la culture, à la santé, à l’éducation, à la participation, au libre développement personnel et le droit à la consommation des biens nécessaires pour une vie saine et heureuse.

 

* Le fonctionnement actuel de notre système politique et gouvernemental ne répond pas à ces priorités et il devient un obstacle pour le progrès de l’humanité.

 

* La démocratie part du peuple, par conséquent le gouvernement doit appartenir au peuple. Cependant, dans ce pays, la plupart de la classe politique ne nous écoute même pas. Ses fonctions devraient être de porter nos voix aux institutions, en facilitant la participation politique des citoyens grâce à des voies directes de démocratie et aussi, procurant le plus de bienfait possible à la majorité de la société, et pas celle de s’enrichir et de prospérer à nos dépens, en suivant les ordres des pouvoirs économiques et en s’accrochant au pouvoir grâce à une dictature partitocratique.

 

* La soif de pouvoir et son accumulation entre les mains de quelques-uns crée inégalités, crispations et injustices, ce qui mène à la violence, que nous refusons. Le modèle économique en vigueur, obsolète et antinaturel, coince le système social dans une spirale, qui se consomme par elle-même, enrichissant une minorité et le reste tombant dans la pauvreté. Jusqu’au malaise.

 

* La volonté et le but du système est l’accumulation d’argent, tout en la plaçant au-dessus de l’efficience et le bien-être de la société ; gaspillant nos ressources, détruisant la planète, générant du chômage et des consommateurs malheureux.

 

* Nous, citoyens, faisons parti de l’engrenage d’une machine destinée à enrichir cette minorité qui ne connait même pas nos besoins. Nous sommes anonymes, mais, sans nous, rien de cela n’existerait, car nous faisons bouger le monde.

 

* Si, en tant que société nous apprenons à ne pas confier notre avenir à une abstraite rentabilité économique qui ne tourne jamais à notre avantage, nous pourrons effacer les abus et les manques que nous endurons tous. Nous avons besoin d’une révolution éthique. On a placé l’argent au-dessus de l’ Etre Humain, alors qu’il faut le mettre à notre service. Nous sommes des personnes, pas des produits du marché. Je ne suis pas que ce que j’achète, pourquoi je l’achète ou à qui je l’achète.

 

A la vue de cela, je suis indigné/e

 

Je crois que je peux le changer.

Je crois que je peux aider.

Je sais que, tous ensemble, on le peut.

Sors avec nous. C’est ton droit.

 

 

On voit ces derniers jours des centaines de rassemblements de soutien poursuivant le même objectif, partout dans le monde (538 au 21/05 à 12h, carte sur http://www.thetechnoant.info/campmap/. ) De nombreuses villes françaises entrent également en lutte : Paris, Lyon, Bordeaux, Marseille, Toulouse, Grenoble, Clermont-Ferrand, Mens, Les Ulis, Strasbourg, Perpignan, Nice, Poitiers, etc. Ce mouvement est coordonné sur http://reelledemocratie.xooit.com/index.php. A Paris, la place Bastille a été occupée par plus d’une centaine de citoyens.

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30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 08:01
Deuxième assises CGT de l’outremer.

Les camarades Alain HIERSO puis Jean Joël LAMAIN ont participé aux Assises de l’Outremer organisées par le collectif des originaires d’outremer  les 05 et 06 mai au siège de la CGT à Montreuil. La Guadeloupe et la Réunion avaient aussi délégué chacune un représentant. Nous avons interrogé Alain HIERSO sur le déroulement de ce rassemblement.

 Qui sont les organisateurs de ces Assises ?

 Il s’agit d’un collectif confédéral des originaires de l’Outremer organisés au sein de la CGT depuis plusieurs dizaines d’années. Ce collectif n’a pas pour but de se substituer aux instances confédérales mais il se veut un lieu d’échanges et d’analyses en vue de sortir des revendications et de proposer des moyens d’actions pour faire avancer les droits et les besoins particuliers des originaires qui vivent et travaillent dans l’hexagone.

Qui sont ces originaires d’Outremer ?
 
 Ce sont de nombreux travailleurs issus des pays colonisés par la France et, pour la plupart, arrivés en France par le biais du dispositif gouvernemental du BUMIDOM, organisme de migration de l’Etat français de 1962 à 1981. On les retrouve dans le secteur public, la Poste, les Hôpitaux de Paris, la ville de Paris mais aussi dans le secteur privé SNCF, RATP, le commerce, le bâtiment.
 
Quelles sont leurs revendications ?
 
Les doits des travailleurs de la fonction publique relèvent de dispositions statutaires et on ne peut pas parler d’avantages spécifiques aux agents d’outremer c'est-à-dire que le fonctionnaire non originaire qui s’installe en outremer bénéficie du même traitement que son homologue de l’outremer qui fait le trajet dans l’autre sens. Cela n’a pas toujours été le cas et en défaveur des ultramarins. Cependant, les garanties collectives obtenues par les luttes autant dans l’outremer que dans l’hexagone sont chaque année remises en cause d’où une mobilisation permanente de nos compatriotes :
 
-          Versement d’une prime spéciale d’installation
-          Prime de vie chère
-          Indemnité temporaire de retraite (Non versée aux Antilles Guyane)
-          Congé bonifié de 65 jours tous les trois ans pour l’agent et sa famille
-          Bonification partielle pour service hors d’Europe  entrant dans le calcul de la durée des services pour la retraite.
 
Les travailleurs du secteur privé ne bénéficient pas de ces acquis. Dans l’immédiat, une offensive pour se réapproprier l’histoire collective des originaires des colonisés est possible. L’histoire de la colonisation passe par celle de l’esclavage, celle de la déportation de milliers d’africains puis d’asiatiques que les gouvernements tant de droite que de gauche cherchent à museler par des formes d’aliénation. C’est le combat pour la mémoire. La revendication porte sur la reconnaissance d’un jour férié et chômé pour l’abolition de l’esclavage pour tous les travailleurs de France car l’histoire de l’esclavage et de son abolition c’est aussi l’histoire de France. Nos compatriotes avaient  programmé un nouveau rendez-vous pour le 10 mai sur cette revendication. Le camarade LAMAIN y a participé.
 
C’est aussi le combat conte les discriminations. Nos compatriotes subissent des comportements xénophobes notamment à caractère racial dans l’accès à l’emploi, les salaires, la formation, la carrière, le logement, la politique sécuritaire, à l’instar des autres immigrés.

© CGT MARTINIQUE

2011

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30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 07:28
29-05-2011

21:30

Lalla Aicha Sy, présidente du CSVVDH :

 

 

"Nous avons toujours souhaité connaitre la vérité ...

 

 

...sur les disparitions… "


Lalla Aicha Sy est la présidente du comité de solidarité avec les victimes des violations des droits humains. Elle a toujours accompagné les veuves des victimes d’exécutions sommaires. Cridem a recueilli sa réaction au sujet du projet d’identification des tombes des disparus.

Sur instruction du président de la République « l'Etat lancera, dans les jours à venir, une opération visant à localiser les tombes des Mauritaniens décédés dans des circonstances ambiguës. » Il s’agit, comme annoncé par le ministre chargé des affaires islamiques « d’élaborer un plan topographique permettant de localiser et de marquer les tombes de tous les disparus mauritaniens depuis l'indépendance jusqu'à nos jours.»

L’objectif, toujours selon le ministre chargé des affaires islamiques est de « consolider les liens d'union, d'entente et de solidarité entre toutes les franges du peuple mauritanien et permettre aux parents des défunts de visiter leurs tombes qui seront désormais connues et clairement marquées.»

Quelles est votre réaction par rapport à cette initiative. Est-elle réalisable ? Contribuera-t-elle à consolider la cohésion nationale ? Est-ce une réponse appropriée à la demande des ayants droits des disparus ?

Comme vous ; j’ai appris la nouvelle à travers les médias

Je suis par principes d’accord avec toute action visant à faire la lumière sur les violations subies par les populations parce que j’estime que la dignité humaine est un droit inaliénable et que par principe elle doit être respectée. Pour cette circonstance je tiens à rappeler que les exécutions extrajudiciaires de années 89 et 91 de part leur caractère et ampleur, constituent une atteinte grave à la dignité humaine et une fracture sociale sans précédent. Des familles entières ont vécu cette catastrophe dans leur âme.

La localisation des tombes des morts a toujours été une des revendications des victimes et des associations des droits de l’Homme. Nous avons toujours souhaité connaitre la vérité sur les disparitions et avons souhaité que leurs tombes soient identifiés et restituer aux familles ; pour qu’enfin, ces défunts puissent bénéficier de sépultures et prières telles que recommandées par la religion.

Cependant, je ne comprends pas les raisons qui expliquent l’attitude de l’état qui consiste à refuser toute concertation avec les ayants doits et les organisations de défense des droits de l’homme qui se sont toujours investies dans la recherche de solutions justes à cette épineuse question.

Je reste convaincu que la solution qui se veut transparente juste et viable passe par un processus dont la première étape serait :

- La mise en place d’une commission vérité réconciliation comme l’a si bien dit la représentante du collectif des veuves Maimouna Alpha Sy ; dans une interview à la chaine Eljezira. Cette commission vérité réconciliation, sera constituée des représentants des victimes ; des ONG de défense des droits humains, du haut commissariat aux droits humains en Mauritanie des personnalités reconnues pour leur probité et leur honnêteté, mais aussi de l’état.

Cette commission une fois installée, aura comme mandat de réfléchir sur toutes les étapes du processus, dont l’objectif est de « consolider les liens d'unité, d'entente et de solidarité entre toutes les franges du peuple mauritanien. » A partir de ce moment, l’opération visant à localiser les tombes des Mauritaniens décédés dans des circonstances non en encore élucidées, afin de permettre aux parents des défunts de les visiter serait une étape du processus qui consiste à rendre justice à toutes les victimes.

La localisation de ces tombes n’est qu’un signe de reconnaissance qu’il faut saluer, pour autant il ne suffit pas pour rendre justice aux victimes.

A mon sens, il faut apporter des réponses justes et équitables aux autres préoccupations telles que :

- Que faire des auteurs des crimes qui circulent en toute impunité, sans être inquiétés et sans aucun remord ? Et les devoirs de vérité ? de justice et de réparation ?

Il faudrait aussi nécessairement; abroger la loi scélérate d’amnistie.

Voilà autant de questions sur lesquels seule une commission vérité réconciliation doit se prononcer.

Propos recueillis par Khalilou Diagana
Pour Cridem


 

 


Toute reprise d'article ou extrait d'article devra inclure une référence à www.cridem.org

 

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27 mai 2011 5 27 /05 /mai /2011 17:12
Le 22 MAI 1848 : les esclaves se libèrent… Marie-Christine PERMAL : intervention du 22 mai 2009 à l’Anse CAFARD

                           Le 22 MAI 1848 : les esclaves se libèrent…
 
      C’est une grande émotion, pour moi, de me trouver aujourd’hui, 22 mai 2009 , avec vous, camarades, à l’Anse Cafard, face à ces sculptures massives, voutées,  si puissantes, tournées vers l’Afrique, loin là-bas au-delà de l’océan . Symboles de malheur absolu mais aussi de force, de détermination ….
 
     Parler du 22 mai aujourd’hui, c’est commémorer une révolte et une victoire : la liberté gagnée dans la lutte après deux siècles de déportation et d’esclavage.
 
    Ce n’est pas l’abolition de l’esclavage que nous célébrons aujourd’hui ici - elle n’est qu’une forme juridique qui serait vide de sens si elle n’était vivifiée par les luttes incessantes des esclaves pour l’obtenir et ensuite celles des affranchis que nous sommes  pour la conserver contre ses remises en cause plus ou moins masquées .
 
     Parler du 22 mai aujourd’hui, c’est trouver à nos luttes d’aujourd’hui une filiation, c’est établir une continuité entre les combats du passé et ceux de notre présent contre l’exploitation coloniale capitaliste qui, elle, n’a pas cessé.
 
 
     Tout d’abord quelques mots pour rappeler le contexte historique.
 .
     Le 22 mai 1848, la Martinique est une possession, une colonie de la France depuis plus de deux siècles – les Amérindiens qui la peuplaient alors, les Kalinas, ont été rapidement éliminés, les colons européens se sont emparés de leur terre et ont importé des captifs africains pour la travailler. Une société neuve basée sur le travail forcé et le trafic d’êtres humains voit le jour pour le plus grand bien de la France et de ses représentants sur place.
 
     En février 1848, une révolution républicaine se produit en France. Le roi  Louis-Philippe est contraint à l’abdication. Un gouvernement provisoire proclame la république. Il est formé de républicains modérés mais aussi de socialistes qui, comme Victor Schoelcher, font depuis plus d’une dizaine d’années campagne pour l’abolition de l’esclavage dans les colonies ;
     Le 27 avril 1848, le gouvernement provisoire prend un décret : « L’esclavage est entièrement aboli dans les colonies et possessions françaises »(article 1) . Le 4 mars précédent il avait proclamé que « nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves ».
     Ce décret n’arrive pas soudainement. Il est l’aboutissement d’un processus d’assouplissement de l’esclavage qui se développe au cours de cette première moitié du XIXième siècle. Il faut rappeler qu’il a été précédé en 1845 par la loi MAKAUD qui s’est substituée au Code Noir et qui prévoit une émancipation progressive échelonnée sur 30 ou 40 ans ; elle précise droits et devoirs des maîtres et des esclaves dans le sens d’un « allègement » de l’esclavage. Elle est le résultat des révoltes de plus en plus fréquentes, de plus en plus violentes des esclaves et des « libres » qui, plus que jamais, depuis le début du siècle, mettent en danger la colonie.
     Il faut dire aussi que la Grande-Bretagne a aboli l’esclavage  dans ses colonies en 1838, que la Traite négrière a été interdite au 1815 et que, surtout en 1804,  HAÏTI est devenu la première république noire d’Amérique et la seule issue d’une révolution anti-esclavagiste .
 
     C’est dans ce climat que toute la Martinique attend l’abolition de l’esclavage, les uns avec enthousiasme et impatience, les autres avec rage… Depuis le 26 mars, les événements de France sont connus et on sait qu’un décret d’abolition de l’esclavage doit être pris .
     Les esclaves ne veulent pas se faire voler leur émancipation et font pression : ils refusent de travailler et quittent les habitations pour se rassembler dans les bourgs en compagnie des « libres », à Case-Pilote, au Marin, au Saint-Esprit, à Sainte Marie, à Sainte-Anne, au Lamentin….. Ils veulent obliger les békés qu’ils rencontrent à signer des pétitions en faveur de l’émancipation. L’atmosphère est explosive. Ils ont tracé le chemin de la liberté et se comportent en personnes libres.
 
     Certains békés comme Huc, le maire du Prêcheur, recrutent des hommes armés et  se montrent de plus en plus durs, cruels et intransigeants envers leurs esclaves, affichant haine et mépris, dérogeant  même de la loi Makaud.
      D’autres sentent le vent tourner. Ils jouent la carte de la conciliation  et de la prudence.
     Pendant les huit semaines qui précèdent le 22 mai, la tension monte.
     Les mulâtres tout en soutenant la lutte des esclaves les incitent à la modération et tout en cherchant à les organiser tentent en fait à les canaliser par de « bonnes paroles ». Ils répètent à l’envie leur mot d’ordre : « L’ordre et la liberté ».
    
     Nous connaissons tous l’événement déclencheur de l’insurrection du 22 mai.
     Le 20 mai au soir à l’habitation Duchamp, le maître a interdit le tambour pendant la soirée de la grage du manioc ; pourtant c’est la coutume et Romain, le tanbouyé, refuse d’obéir ; il en résulte un « charivari ». Duchamp appelle les gendarmes qui arrêtent Romain et le conduisent à la geôle à Saint-Pierre.
     Une foule de plus en plus nombreuse d’esclaves et de « libres » venant  du Prêcheur mais aussi du Morne Rouge, du Carbet, des quartiers de Saint-Pierre se dirigent vers la ville et réclament à grands cris la libération de Romain. Pory-Papy, un mulâtre adjoint au maire de Saint-Pierre prend sur lui de faire libérer Romain. Les esclaves regagnent joyeusement les habitations : ils ont gagné !
      Tout aurait pu en rester là si Huc n’avait pas fait tirer sur eux – trois morts et dix blessés. On fait demi-tour, on se dirige vers Saint-Pierre emportant morts et blessés. On tue au passage le beau-fils de Huc qui fait de la provocation. Il s’en suit une véritable bataille qui fera vingt  morts dans les rangs des révoltés. Mais ils l’emporteront. Huc et quelques familles békés sont contraints de fuir par la mer et quitteront définitivement la Martinique pour Cuba, Puerto-Rico ou mieux le sud des Etats-Unis où l’esclavage a encore de belles années devant lui…      
      Le 22 mai, le peuple   envahit les rues de Saint-Pierre. Des familles békés se réfugient dans la maison des Sanois. Les insurgés entourent la maison. Un coup de feu est tiré de l’intérieur et tue un manifestant ; la maison est alors incendiée ; on dénombrera trente-trois morts.
     Nous sommes le soir du 22 mai, une grande partie de Saint-Pierre est en flammes. Le peuple en armes s’est soulevé et réclame l’abolition immédiate de l’esclavage.
     L e conseil municipal de Saint-Pierre appelle en urgence  le gouverneur Rostoland  et lui demande de décréter l’abolition même si pour ce faire il outrepasse ses pouvoirs.
     Le 23 mai au matin le décret d’abolition est signé par Rostoland à l’hôtel de l’Intendance : « Considérant que l’esclavage est aboli en droit et qu’il importe à la sécurité du pays de mettre immédiatement à exécution les décisions du gouvernement de la métropole pour l’émancipation générale dans les colonies françaises…. Article 1 L’esclavage est aboli à partir de ce jour à la Martinique ». Trois jours plus tard l’abolition sera étendue à la Guadeloupe.
      L e décret du 27 avril arrivera 10 jours plus tard, le 4 juin, avec le nouveau représentant de la France, François-Auguste Perrinon, un mulâtre.   
     Le soir du 23 mai non seulement Saint-Pierre mais toute la Martinique est dans la joie .On crie : « Vive la liberté ! », « Vive la république ». On plante des arbres de la liberté sur les places et des prêtres, consentants ou forcés, les bénissent. L’armée présente les armes et salue le drapeau de la liberté, bleu-blanc-rouge.
 
      
          Durant les semaines qui ont précédé l’abolition et celles qui l’ont suivie, quelque chose de fondamental s’est produit :
     On est passé  d’une société dominée par les colons,  propriétaires de la terre, maîtres d’esclaves, à une société contrôlée – même de façon provisoire pour quelques jours seulement – par les esclaves puis par les nouveaux libres .
     Pour la première fois la lutte  séculaire des esclaves contre leur maîtres a infléchi durablement le cours de l’histoire : la Martinique n’est plus une société esclavagiste .
     Toutes les forces en présence dans la société martiniquaise au lendemain du 22 mai 1848 – Békés, mulâtres, Etat, Eglise, nouveaux libres – doivent tenir compte de ce nouvel état de fait.
       Des questions s’imposent.
      Quelles sont ces forces  en action dans les jours qui ont précédé l’abolition ? comment ont-elles agi ? au nom de quoi ? quelles alliances elles ont contractées ? comment elles se sont opposées ? Comment s’est articulé à ce moment la lutte des classes pour tisser la trame du pays Martinique ?
 
Tout d’abord les esclaves . Ils luttent pour leur liberté et s’opposent de tout temps à leurs maîtres, à ceux dont ils sont la propriété, le « bien meuble » c'est-à-dire ce qu’on vend et qu’on achète, qu’on échange et dont on hérite .
Mais qu’est-ce qu’être libre pour un esclave ? Il ne s’agit pas de l’idée de liberté chère aux philosophes du XVIII ième siècle mais de quelque chose de bien concret :
  C’est manger à sa faim alors que la pénurie d’aliments est  un problème permanent de la société esclavagiste dont l’essentiel de l’effort de production concerne les produits d’exportation et pour laquelle il faut importer de la nourriture .
  C’est circuler librement dans le pays sans  le billet du maître.
  C’est habiter où on veut et non obligatoirement sur la terre du maître, dans la case donnée par le maître.
  C’est s’habiller à son goût sans ces règlements qui obligent à  porter les haillons donnés par le maître.
  C’est travailler où on veut, avec qui et comme on veut et effectuer un travail harassant du lever au coucher du soleil sous le fouet du commandeur .
  C’est bénéficier des richesses que son travail produit et non ces tâches sans fin ni but qui ne produisent aucun avenir .
  C’est croire à Dieu ou aux Dieux et non se voir imposer le baptême .
  C’est avoir le droit d’aimer et même d’épouser l’homme ou la femme de son choix sans être contraint de requérir l’autorisation du maître – sans risquer aussi de se trouver son jouet sexuel.
 C’est élever ses enfants, être responsable d’eux, pouvoir  leur enseigner une vie digne sans se dire que tant qu’ils seront la propriété du maître il n’y aura aucun avenir pour eux .
 Et surtout cesser d’être la victime écrasée par les souffrances d’une exploitation sans frein, les violences physiques, l’humiliation, l’avilissement, le mépris, le racisme .
        Etre libre c’est être une femme, un homme reconnus comme des personnes….
Très tôt les esclaves ont cherché à imposer leur humanité et ceci par toutes sortes de moyens qui vont de la compromission à la révolte sanglante en passant par la résistance passive, le vol, le mensonge, la complaisance sexuelle … Peu à peu les luttes se radicalisent, les esclaves passent à l’offensive, conscients que la fin de l’esclavage dépend avant tout de leur combat , un combat à mort : « la liberté ou la mort ».
 
       Leurs plus proches alliés sont les « libres » ou « libres de couleur »  . Ils sont en général récemment affranchis par leurs maîtres ou bien ils ont pu économiser pour « racheter » leur liberté, celle de leur femme, de leurs enfants. Ils forment le peuple des bourgs, ils sont petits marchands, petits artisans. Ils sont aussi petits cadres d’habitation ou même paysans . Ils sont pauvres . Ils luttent pour une vie matérielle meilleure, subissent la double discrimination de la misère et de la couleur. Ils sont en liberté surveillée . Ils pensent que la disparition de l’esclavage est essentielle à l’amélioration de leur situation et à la reconnaissance de leur dignité . Ils n’ont pas oublié qu’il y a peu ils étaient dans la servitude et que leur libération est précaire .
 
          Les mulâtres sont eux aussi « des libres de couleur » mais leur affranchissement est plus ancien et souvent directement lié à leur métissage .Ils ont souvent bénéficié des largesses de leurs pères békés . Ils forment une catégorie sociale particulière caractérisée par l’instruction, la fortune, la propriété de terres et d’esclaves. Ils ne leur manque que d’être vraiment blancs pour participer réellement au contrôle de la société et au besoin la dominer .
    Ils luttent donc pour l’égalité avec les blancs et cela passe par la disparition de l’esclavage, cette infamie liée  à la couleur de la peau . Ils mènent à la fois une lutte antiraciste et abolitionniste .En France, ils participent à la commission qui prépare le décret d’abolition . En Martinique  la « politique de fusion »  leur permet d’avoir accès aux différents conseils de la colonie, aux chambres de commerce de Saint-Pierre et de Fort-de- France ; leur terrain de lutte se situe au niveau des instances politiques et économiques .
Ils sont partisans, nous l’avons vu ,de « l’ordre et de la liberté ». Ils soutiennent une abolition « sans émeute et sans répression ». Ils interviennent dans les événements de mai 1848 pour rétablir l’ordre par le dialogue et la justice – ainsi Pory-Papy fait libérer Romain . Leur arme est la parole et ils ne participent pas physiquement à la lutte même s’il arrive à certains de prendre des risques réels en s’interposant entre les adversaires .
Ils sont persuadés que l’abolition apportera à la colonie une vie nouvelle et qu’il est indispensable d’éduquer le peuple aux exigences d’une liberté responsable. Républicains,  souvent libres penseurs, ils lutteront pour une école laïque, gratuite et obligatoire pour tous qui leur semble seule capable de dispenser une éducation conforme au changement social.
 
           Les békés, ou colons, propriétaires d’esclaves blancs  forment la classe dirigeante de la         
           la colonie tant sur le plan politique qu’économique . Ils sont négociants et s’occupent d’exporter ce que la colonie produit et d’importer ce dont elle a besoin . Ils possèdent de grandes propriétés qu’ils plantent en cannes, et des sucreries .
Ils bénéficient de tous les privilèges et leur couleur de peau jalousement gardée au sein de leur caste est le symbole de leur domination .
           En 1848, deux catégories de békés : ceux qui sont opposés à l’émancipation des esclaves et ceux qui y sont favorables.
           Les premiers ne sont pas les plus nombreux mais ils sont les plus virulents . Racistes sans complexe, ils considèrent que les personnes qui ont la peau noire sont nés pour être esclaves et sont incapables de faire autre chose  que d’obéir inconditionnellement à celles qui ont la peau blanche.
Malgré la loi Makaud ils continuent à mener la vie dure à leurs esclaves et répriment violemment toute tentative de désobéissance . Ils font la chasse aux marrons qui fuient en canot vers la Dominique et Sainte-Lucie où  l’esclavage a été aboli depuis dix ans.
Ils sont farouchement opposés aux mulâtres qu’ils méprisent et accusent de soutenir et d’organiser les rebelles. Ils ne veulent pas de « la politique de fusion » dans les conseils municipaux qu’ils détiennent au Prêcheur, à Case Pilote ; au Gros Morne. Nous avons vu leur rôle dans les événements du Prêcheur . Souvent ils préfèrent fuir vers des pays où l’esclavage continue à sévir plutôt que s’adapter à la nouvelle société .
             On peut appeler les békés qui sont favorables à l’abolition de l’esclavage les colons réformateurs . Ils sont  d’accord avec une alliance avec les mulâtres et à la politique de fusion dans les conseils municipaux . Ils pensent que la société martiniquaise doit être réformée .
Le mode de production esclavagiste est dépassé et il est un frein à la modernisation de l’industrie sucrière . Les colonies doivent à leur tour participer à la révolution industrielle qui transforme profondément les modes de production en Europe et moderniser l’industrie sucrière en la mécanisant .
 Or les esclaves ne souhaitent ni ne peuvent s’adapter à ce nouveau mode de production . Contraints, ils ne s’investissent pas dans un travail dont ils ne tirent aucun bénéfice . Ils ne prennent aucun soin des outils, comment entretiendraient-ils des machines ? Ils ne sont pas disposés à apprendre de nouvelles technologies aussi bien par manque d’instruction que par manque d’intérêt . Leur entretien qui comprend aussi bien la nourriture, les vêtements, le logement coûte cher d’autant plus que certains d’entr’eux comme les enfants, les vieillards, les malades sont inproductifs mais sont à la charge du maître . Tout compte fait il vaudrait mieux verser des salaires très bas et être débarrassé de ces charges . Le travail libre est le moins onéreux .
Par ailleurs la condition d’esclave ne favorise pas la natalité dont le taux est très bas . On voit des femmes qui préfèrent avorter ou tuer leur enfant à la naissance plutôt que de donner la vie à un petit esclave . Le taux de mortalité reste très élevé L’interdiction de la traite ne permet pas de s’approvisionner en travailleurs. Dans une société débarrassée de l’esclavage on peut envisager une politique nataliste en encourageant la formation de familles stables ; ne faisait-on pas crier aux esclaves à la veille de l’abolition « Vive le travail ! vive le mariage ! » ?
Enfin la situation  actuelle est intenable . Les esclaves prennent de plus en plus de liberté et sont prêts à la révolte à la moindre remontrance . Haïti et son indépendance sont un exemple pour beaucoup d’esclaves . Les békés réformateurs préfèrent négocier de nouveaux rapports sociaux plutôt que de risquer de perdre la colonie .
Ils seront donc de « bons maîtres »  comme Pécoul et Périnel ; ils s’impliqueront dans le processus de changement au point d’élaborer des projets de contrats d’association destinés à préparer au travail libre , c’est le cas de Louis Hayot.
Ils ont compris que le maintien de leur domination sur la société coloniale est à ce prix .
 
 
 
          L’Etat, depuis février 1848, est représenté en France par un gouvernement provisoire républicain . L’abolition de l’esclavage est une des premières mesures prises par ce gouvernement à peine deux mois après la prise de pouvoir. Le principe du suffrage presque universel puisque seulement masculin est applicable dans les colonies  . Conformément à l’idéologie républicaine et abolitionniste, l’objectif est de libérer .
Un officier mulâtre de la Martinique,  Perrinon, est nommé commissaire général de la République en Martinique en remplacement du gouverneur provisoire le général Rostoland.
 Mais le gouvernement provisoire ne remet pas en cause le système colonial : la Martinique et la Guadeloupe demeurent des colonies de la France . Il ne remet même pas en cause le système de propriété esclavagiste puisqu’il prévoit d’accorder une indemnité aux anciens propriétaires d’esclaves dans le décret même qui libère ces esclaves.
      En Martinique l’Etat est représenté par le gouverneur provisoire Rostoland  à qui sont accordés des pouvoirs extraordinaires . Ici l’objectif est plus de contenir que de libérer . La tête pensante du pouvoir local est Louis Husson, un béké, directeur de l’Intérieur qui adresse aux « cultivateurs esclaves » en français et en créole une proclamation dès le 31 mars 1848 . Ce texte répond à trois préoccupations :
-         assurer les esclaves de l’émancipation prochaine pour calmer leur impatience mais c’est une liberté sous contrôle : « Soyez dociles aux ordres de vos maîtres »
-         rassurer les békés : l’ordre sera maintenu et ils ne manqueront pas de main d’œuvre. Le décret d’application ne s’appliquera qu’après la récolte c’est-à-dire pas avant le mois d’août. Le travail libre sera règlementé.
-         donner satisfaction aux mulâtres en leur promettant l’égalité totale et une participation plus large aux instances politiques .
 On parle de « réconciliation entre les races » et « d’oubli du passé » .
Le pouvoir local d’Etat s’allie aux mulâtres et aux békés réformateurs face au danger de désordre et de violence des esclaves et des « libres » pauvres . Abolition, d’accord . Liberté, d’accord mais rien ne doit changer au fond .
 
 
          L’Eglise catholique  depuis le début de la colonisation est  en charge de l’âme de chacun , elle dit le bien et le mal, elle dispense à chacun les bienfaits de la religion . Elle justifie le pouvoir des blancs par la Bible et fait accepter leur condition aux noirs par la même bible. Elle baptise les esclaves et mène auprès d’eux son entreprise de domestication .
    En 1848, elle est d’ une grande importance pour le peuple des esclaves et des « libres ». La messe est une occasion de dévotion et de rassemblement . Le 23 mai et les jours qui suivent on exige des prêtres qu’ils bénissent les arbres de la liberté . Un Te Deum est chanté à Saint-Pierre pour célébrer l’abolition .
Mais qu’en est-il de la hiérarchie et des prêtres ? On peut considérer trois groupes .
-         un clergé réactionnaire aux côtés des békés restés esclavagistes, favorables à la ségrégation raciale dans les établissements scolaires, contre la libération, contre l’égalité .
-         un clergé qui s’adapte au jour le jour à la situation nouvelle, c’est la hiérarchie dont l’objectif est de maintenir l’ordre en exhortant à la sagesse, au mariage et au travail – l’important est pour les nouveaux libres d’être « des citoyens utiles et laborieux »
-         enfin un clergé progressiste qui est minoritaire mais très proche du peuple .Il prend à son compte les valeurs d’égalité, de liberté et de justice . Ainsi l’abbé Marchesi à Rivière Pilote prononce des homélies en faveur de l’abolition et réunit dans une même cérémonie des communiants noirs, blancs et mulâtres . Pendant ces jours de libération, la hiérarchie tente de prendre des sanctions contre ces prêtres mais doit céder devant la  pression populaire.
L’Eglise est traversée par le débat de fond de la société qui change : liberté pour les esclaves /  égalité pour tous . Par la diversité même de ses réponses, elle maintient son influence sur l’ensemble de la société . Elle a main mise sur la conscience , ce qui lui donne le pouvoir de poursuivre sa mission de domination spirituelle.
 
 
Une nouvelle société se met en place . Les forces en présence modifient leurs stratégies en fonction de nouveaux enjeux .
 
Les nouveaux libres étrennent leur liberté toute neuve : circuler librement ; ne plus être attaché à une habitation et à un maître, s’installer sur un lopin de terre et vivre de ses récoltes ou bien s’installer en ville et vivre de ses talents.
 
Pour les békés, pour les mulâtres, pour l’Etat et pour l’Eglise il est impératif de rétablir l’ordre et de mettre les nouveaux libres au travail . Alors on contrôle leurs allers et venues  par le livret et on punit leur « vagabondage » - on essaye de prendre des mesures coercitives qui ressemblent à un retour en arrière – mais rien n’y fait ; la main d’œuvre manque  et dès 1852 on organise l’immigration de travailleurs engagés indiens, africains, asiatiques .
 
Les usines centrales remplacent rapidement les sucreries ; le capital se concentre entre les mains de quelques familles békés .
La classe capitaliste accroît sa puissance économique et politique.
L’exploitation prend une forme différente. Les salaires sont très bas. Aucune protection sociale. La misère est le lot du plus grand nombre.
La classe ouvrière se forme et prend de plus en plus conscience que sa lutte contre ses nouveaux exploiteurs  constitue la trame même de la société martiniquaise .
Dans les années qui suivent les syndicats se créent, les grève se multiplient et ce malgré la répression….
De mai 1848 à février 2009, le peuple martiniquais a pris conscience de lui-même . I l se reconnaît comme peuple créateur de sa propre histoire . Il ne se réduit pas à une simple population comme voudrait le faire croire l’Etat français qui ne reconnaît sur ses territoires que le peuple français. Il sait qu’il est une puissance capable de lutter contre ceux qui l’exploitent et de changer ainsi le cours de l’histoire de la Martinique.                                                                                                                                    


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27 mai 2011 5 27 /05 /mai /2011 17:07

Abolition de l’esclavage : le décret du 27 avril 1848 (M-C Permal)

Chaque année, nous fêtons le 22 mai et nous nous souvenons avec émotion et fierté de la grande révolte qui a mis fin en Martinique au système esclavagiste : l’émancipation n’a pas été octroyée, nous savons que nos ancêtres l’ont conquise. Le soir du 22 mai, SAINT-PIERRE est en flammes. Le 23 au matin le gouverneur ROSTOLAND , pressé par le conseil municipal de la ville, signe le décret d’abolition :
 « Considérant que l’esclavage est aboli en droit et qu’il importe à la sécurité du pays de  mettre immédiatement à exécution les décisions du gouvernement de la métropole pour l’émancipation générale dans les colonies françaises. 
Article 1 : L’esclavage est aboli à partir de ce jour à la Martinique. ».
C’est le décret du 27 avril 1848 que le gouverneur Rostoland invoque pour s’autoriser à abolir l’esclavage en Martinique.
 
Dès mars 1848, ce décret est attendu en Martinique, dans l’impatience par les esclaves, dans la crainte par les maîtres ;  on sait qu’il existe et il tarde à venir. On sait qu’une révolution s’est produite en France, que le roi Louis-Philippe a été contraint à l’abdication, et que la IIème République a été proclamée. On sait aussi que le Gouvernement Provisoire, au pouvoir en attendant l’élection et la réunion d’une assemblée nationale constituante, comprend des abolitionnistes et parmi eux  Arago, Lamartine et Victor Schœlcher, sous-secrétaire d’Etat à la Marine et aux Colonies. On sait que pour ces républicains convaincus,  l’esclavage est « un attentat contre la dignité humaine » et « une violation du dogme républicain : liberté, égalité, fraternité » et qu’il y a une contradiction fondamentale entre l’esclavage et la république …
 
Le 27 avril, le Gouvernement provisoire adopte douze décrets. Le premier abolit l’esclavage. Les autres règlementent la nouvelle vie sociale  qui naîtra  de cette abolition dans les colonies.
 
Tout d’abord quels sont les termes du décret d’abolition lui-même ?
Article 1 :
 « L’esclavage sera entièrement  aboli dans toutes  les colonies et possessions françaises, deux mois après lapromulgation du présent décret dans chacune d’elles » ; auparavant un décret du 04 mars avait affirmé « quenulle terre de France ne peut plus porter d’esclaves ».
 
 « A partir de la promulgation du présent décret dans les colonies, tout châtiment corporel, toute vente de personnes non libres, seront absolument interdits. » Le commerce des êtres humains et les sévices physiques  sont explicitement interdits : pour les rédacteurs elles  manifestent à  elles seules la domination des maîtres et la non-liberté des esclaves .
 
L’esclavage est « entièrement aboli ». L’émancipation est générale et s’impose à tous les Français « même en pays étranger ».
 
Mais l’émancipation n’est pas immédiate ; un délai de deux mois est nécessaire «  pour préparer toutes les mesures d’exécution » de l’abolition.
                                                                                                                             
Cette fois-ci, l’abolition sera définitive. Elle ne sera jamais remise en question comme le fut la première abolition, celle de la Convention en février 1794, par Napoléon Bonaparte en 1802.
 
 
Après avoir affirmé le principe de la liberté, le Gouvernement Provisoire en règlemente les limites. Dans les articles suivants et les 11 autres décrets, il définit les mesures qui lui paraissent favorables  la mise en place d’un affranchissement généralisé.
 Voici quelques unes de ces mesures qui semblent les plus significatives.
 
 L’indemnisation des anciens maîtres, des colons est le premier problème. Oui, posséder un être humain est illégitime mais pendant plus de deux siècles la propriété humaine a été légale,  instituée par l’Etat français qu’il soit monarchique ou républicain, autorisée par des lois en bonne et due forme, reconnue par l’Eglise catholique.  Les maîtres, dit-on, n’ont fait qu’appliquer la législation en vigueur, ils ne sont pas légalement responsables, ils doivent donc être dédommagés.  « L’Assemblée Nationale règlera la quotité de l’indemnité accordée auxcolons » dit l’article 5 du décret. Au nom du droit de propriété, Le principe de l’indemnisation fait l’unanimité ; quelques voix discordantes ne seront pas entendues.   Indemnisés, les colons le seront amplement - ce qui permettra de maintenir, même de renforcer  leur pouvoir économique dans  la  nouvelle société coloniale.
 Le principe même de cette indemnisation est un scandale. Les maîtres seraient-ils des victimes ?
 Les vraies victimes ne sont-elles pas les esclaves eux-mêmes ? Quels dédommagements pourraient réparer la déportation, les violences physiques et morales, les contraintes, le travail forcé, les conditions épouvantables de vie et de travail imposés à des milliers d’hommes, de femmes, d’enfants pendant plus de deux siècles par ces mêmes colons ?  
La liberté réduite aux termes d’un marchandage….
 
Etre citoyens français « libres et égaux en droit ». Le suffrage – à moitié universel (les femmes en sont exclues) a été adopté. Les nouveaux libres peuvent exercer leur droit de vote au niveau de leurs communes, de leur cantons.  « Les colonies purifiées de la servitude (…) seront représentées à l’Assemblée Nationale. »qui sera élue plus tard. Ceux qui n’avaient même pas le droit d’être maîtres d’eux-mêmes auront désormais celui de décider pour leur pays et pour la France. C’est un droit tout à fait formel. On peut s’interroger jusqu’à présent sur la réalité du pouvoir ainsi octroyé : quelle prise donne-t-il sur l’existence même des individus qui en « bénéficient » ?  
 
La liberté du travail . La suppression de l’esclavage, par ailleurs, bouleverse toute l’organisation sociale. Les anciens maîtres restent des propriétaires fonciers, des capitalistes, propriétaires des moyens de production. Ils deviennent les patrons de travailleurs libres noirs : ouvriers agricoles sur les habitations, ouvriers industriels dans les usines à sucre naissantes et les distilleries.
Désormais le travail est libre : pas d’association forcée malgré les vœux de certains békés qui craignent de voir leur main d’œuvre disparaître. « Le nègre se livrera au travail s’il y trouve profit convenable ». Juridiquement, le consentement mutuel devient la loi : c’est le contrat de travail.
Certes en principe le travail est libre mais dans les faits, il est obligatoire. Ceux qui ne peuvent justifier d’un emploi sur une habitation ou d’un métier ou de l’exploitation régulière d’un lopin de terre justifiés dans un livret – sorte de passeport intérieur qu’on doit avoir toujours sur soi, sont considérés comme des mendiants et des vagabonds . Arrêtés par les forces de l’ordre, ils sont condamnés à travailler dans les ateliers de discipline au bénéfice de l’Etat.
Les révolutionnaires français de 1848 vouent au travail un véritable culte au travail et à son pouvoir rédempteur ; une fête du travail est instituée : les travailleurs les plus méritants, ceux qui se sont distingués par leur « bonne conduite » y sont récompensés par de l’argent ou même par des lopins « de bonnes terres arables ».
 
Les conflits entre patrons et travailleurs ne  sont plus  réglés selon la volonté des seuls maîtres . Des tribunaux sont  formés . Ils sont présidés par des juges de paix  et constitués de  « jurys cantonaux » . Les membres de ces jurys sont tirés au sort « sur les listes électorales des communes du canton » .Il y a un nombre égal d’employeurs et de travailleurs ; cela ressemble à nos conseils de prud’hommes . On est sensé rechercher la conciliation .
Mais ces tribunaux jugent aussi les troubles à l’ordre public et sur les lieux du travail : il est interdit aux travailleurs et de se réunir pour discuter des conditions de travail, évidemment de faire grève et encore plus de créer des syndicats . Toute tentative de se rassembler, toute demande collective d’augmentation de salaire, tout arrêt de travail collectif sont des délits . Ils sont sanctionnés par des amendes et des peines de prison. La solidarité de classe est un crime ; juridiquement et pratiquement, le travailleur se trouve seul face à la toute puissance de son patron .
 
 
Sur les habitations des problèmes bien particuliers se posent. 
«  celui  la jouissance coutumière de la case et dujardin »dont bénéficiaient les esclaves sur les habitations est l’un des plus importants. Le décret affirme que les cases, les jardins, les arbres de l’habitation sont la propriété privée des propriétaires fonciers. En conséquence, les travailleurs ne peuvent en bénéficier que dans le cadre des contrats d’association ; c’est une contrepartie à l’accomplissement d’un travail sur l’habitation.
En dehors de ces accords, l’occupant sans titre peut-être expulsé par le police. Les travailleurs de l’habitation dépendent du bon vouloir du propriétaire sans garantie légale.
On a vu l’année dernière que la question se posait toujours en Martinique : un nouveau propriétaire a refusé de continuer à loger une famille installée de façon coutumière depuis des décennies sur l’habitation…
 
Il y a aussi la question de la subsistance et de l’entretien des personnes âgées, des malades et des orphelins. Avant l’abolition, l’esclave était la « chose » de son maître. Il en est totalement dépendant. Le maître avait le devoir, prévu dans le CODE NOIR, de le prendre en charge quand il était malade ou trop vieux pour travailler. Les orphelins sont aussi sous sa responsabilité. Après l’abolition, les anciens maîtres sont libérés de toute obligation envers leurs anciens esclaves . Le travailleur est  un individu libre, complètement responsable de lui-même et de sa famille, responsabilité qu’il assume grâce à son salaire. Pour ceux qui ne peuvent pas travailler, le décret prévoit que l’ensemble des travailleurs valides de l’habitation doit fournir au patron une somme de travail supplémentaire équivalente à leur entretien et subsistance. Le devoir d’assistance passe donc du patron aux travailleurs…
Si les travailleurs refusent, le décret envisage la construction d’hospices aux frais de l’Etat…
Les orphelins, eux, seront placés dans des établissements où ils apprendront divers métiers et recevront une instruction….
 
 
«  La société doit l’éducation gratuite à tous ses membres » . Préambule du décret sur l’organisation de l’enseignement dans les colonies françaises. Et l’article 1 :
« Aux colonies, où l’esclavage est aboli par décret de ce jour, il sera fondé, dans chaque commune, une école élémentaire gratuite pour les filles, et une école élémentaire gratuite pour les garçons. »
Et l’école sera obligatoire de six à dix ans aussi bien pour les filles que pour les garçons. Mais on donnera des livres qui montreront « les avantages et la noblesse des travaux de l’agriculture ». De quoi inciter les enfants noirs nouveaux libres à s’estimer heureux de devenir « ti band » après l’âge de 10 ans, et prendre la succession de leurs parents dans les cannes du béké quand ils en auront la force.
On prévoit aussi des collèges communaux, un lycée en Guadeloupe et une école des arts et métiers dans chaque colonie. Combien d’enfants d’amarreuses et de coupeurs de cannes y auront accès ?
Ecole publique, laïque, obligatoire et gratuite. Ecole prévue depuis des décennies par les autorités coloniales : il fallait transformer les esclaves par l’instruction. Ils devaient mériter la liberté en devenant des citoyens «  responsables » et surtout des travailleurs dociles ;  l’instruction pouvait permettre leur intégration  dans l’ordre colonial et l’acceptation d’une exploitation d’une forme nouvelle. Pour le gouvernement français, l’école est indispensable à la réussite de la société coloniale d’après l’esclavage.
 Aucun mot du décret n’évoque ni la couleur, ni l’origine des esclaves des colonies de la France. Il n’y est jamais question des racines profondes du désir de liberté. Le silence est la pire des armes. Le racisme va de soi. « Les nègres n’ont pas de culture » pense-t-on.
 Pour le gouvernement provisoire seule la culture française est civilisatrice.  La domination culturelle doit garantir la paix sociale, l’école en est le vecteur principal..
 
 
Ainsi les révolutionnaires français de 1848 ont voulu concilier LIBERTE et ORDRE dans le contexte colonial où le souci de maintenir à tout prix la paix sociale à l’aide de la loi, de l’éducation et éventuellement de la force ne pouvait mener qu’à de nouvelles formes d’exploitation. Aucune parole du décret n’évoque ni la couleur, ni l’origine des esclaves des colonies de la France     . Il n’est jamais question  les racines profondes de leur désir de liberté.  ils ont été effrayés par la violence de leurs exigences. Ils ont parlé de sécurité, de travail, c’est-à-dire d’ordre. Ils ont choisi leur camp : celui des colons, celui du capital. Ils ont défendu le grand principe de toute colonisation : la prospérité des colonies pour le plus grand profit de leurs métropoles.
 
Désormais les travailleurs noirs des colonies ne seront plus ni châtiés, ni vendus : le décret du 27 avril 1848 l’interdit. Une définition bien négative de la liberté. Ils ne s’en contenteront pas. Leurs  luttes contre toutes les formes d’exploitation témoignent de leur volonté  de donner  sens et contenu à cette liberté. C’est à eux de proclamer qu’ils sont libres et égaux en droit et d’exiger pour tous une liberté pleine et entière. 

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 21:50

octobre 2008

Mehdi Lahlou
De la « directive retour » au « pacte sur l’immigration », la forteresse Europe se construit face au Sud

 

auteur

Medhi Lahlou est Professeur de sciences économiques à l’Institut National de Statistiques et d’Economie Appliquées (INSEA), Rabat, Maroc. Ses recherches portent sur les migrations, le travail des enfants , l’économie marocaine et la politique de l’eau. Il a réalisé 2 enquêtes : ’’Migrations de transit au Maroc’’ et ’’Migrations des Marocains’’. Il réalise dans le cadre du projet RUIG (en partenariat avec Marie Claire Caloz-Tshopp de l’Université de Genève), (...)

Le Gouvernement français ayant fait de l’unification de la politique européenne en matière d’immigration une de ses priorités, la France souhaitait parvenir à un "pacte sur l’immigration" dès son accession à la Présidence de l’UE le 1er juillet 2008 [8]. Finalisé par tous les ministres de l’Intérieur de l’UE, les 7 et 8 juillet, à Cannes en France, le texte du dit Pacte a été adopté par le Conseil européen le 16 octobre 2008, à Bruxelles. Partant de la volonté de ‘’protéger l’Europe’’ – selon le président français, ‘’contre le réchauffement climatique, l’énergie chère et l’immigration irrégulière’’, notamment – ce texte se place dans une position de ‘’fermeture’’ – vis-à-vis des pays de départ des migrants irréguliers - en retenant la prééminence du principe de la ‘’Préférence communautaire’’ comme fondement politique et base de la nouvelle politique migratoire unifiée de l’Europe.

 

Mehdi Lahlou, "De la « directive retour » au « pacte sur l’immigration », la forteresse Europe se construit face au Sud", Recueil Alexandries, Collections Reflets, octobre 2008, url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article834.html

C’est connu, Nicolas Sarkosy actuel Président français et Président de l’Union européenne jusqu’à fin décembre 2008, a constitué son fonds de commerce électoral au Ministère de l’Intérieur [1] de son pays, en orientant son action et sa virulence, principalement sur le thème de la sécurité et la question migratoire [2].

A la veille d’être élu à l’Elysée, il soutenait en particulier que ‘’La politique de l’immigration doit être au premier rang sur notre agenda national, sur notre agenda européen, sur notre agenda méditerranéen, sur notre agenda international’’, il annonçait par la même occasion, le 5 mars 2007 à Marseille - ville symbole du ‘’problème’’ qu’il veut résoudre - que, en tant justement que ministre de l’intérieur de la France, il était parvenu à réaliser 3 ‘’ruptures’’ [3] :

* Première rupture : la procédure de demande d’asile n’est plus une "fabrique à clandestins".

* Deuxième rupture : nous avons raccompagné dans leurs pays d’origine plusieurs dizaines de milliers d’étrangers.

* Troisième rupture : nous avons commencé à choisir les flux d’immigration légale vers notre pays, en réorientant la politique de délivrance des visas et des cartes de séjour.

Devenu Président à partir de mai 2007, son bilan à ce sujet est conforme à ses projets, autant sur le plan national que européen.

A l’échelle de la France, 3 éléments/réalisations sont à relever [4] :

a/ Au niveau institutionnel, il crée dès son arrivée à l’Elysée un nouveau ministère, celui de « la Migration et de l’identité nationale ». Pour la première fois dans l’histoire de la France, un ministère de plein exercice s’est vu ainsi confier la responsabilité de gérer l’ensemble du parcours d’un « étranger candidat à l’immigration ». En réalité, en faisant un amalgame entre migration et identité nationale, ce Ministère – chargé dans les faits de la police et de la « chasse » des migrants - paraît être d’abord un gage vis-à-vis de l’extrême droite, dont les voix ont beaucoup compté dans l’élection de N. Sarkosy.

b/ Le deuxième élément a consisté, en vertu du « principe de souveraineté », de mettre en place les moyens d’une ‘’immigration sélective’’ pour que la France puisse « choisir qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire ».

c/ La troisième réalisation est d’ordre quantitatif. Elle se rattache à une « performance » numérique, celle qui fait du nombre de « reconduites à la frontière » un indicateur de bonne politique. Ainsi, du 1er juin 2007 au 31 mai 2008, 29.729 immigrés clandestins ont été reconduits dans leur pays d’origine, soit une augmentation sans précédent – selon les termes du Ministre français de l’Immigration et de l’identité nationale - de 31 % par rapport à la période précédente. Et « la tendance est similaire pour les cinq premiers mois de l’année (2008) ». En outre, toujours selon le même ministre, « le nombre d’étrangers en situation irrégulière acceptant un départ volontaire progresse : il a été multiplié par près de cinq en un an - plus 374 %. Outre l’encouragement financier, les intéressés comprennent qu’ils ont intérêt à respecter les règles et à repartir dans leur pays avec un projet professionnel, dans la dignité » [5].

Au niveau européen, le président français va mettre une plus grande pression sur ses pairs de l’UE – sur l’Italie et l’Espagne, notamment – pour accélérer la cadence en matière de politique migratoire européenne, pour aller dans le même sens que le nouveau exécutif français

A/ La « Directive retour » :

En ce sens, les 27 ministres de l’Intérieur de l’Union européenne, réunis le 5 juin à Luxembourg, sont tombés d’accord sur la « Directive retour ». Celle-ci – qui va provoquer un tollé de protestations au sein de la société civile européenne et de la part de nombreux chefs d’Etat africains et latino-américains [6] - prévoit notamment "l’unification des normes et des procédures relatives au retour des ressortissants des pays tiers résidant illégalement sur le territoire des Etats membres".

Ce texte fixe, entre autres, à dix-huit mois la durée maximale de détention des immigrés illégaux avant leur expulsion : un maximum de six mois, dans un premier temps, pouvant être prolongé de douze mois dans certaines circonstances, par exemple le manque de coopération du pays d’origine du migrant qui refuserait d’accepter son retour. Il fixe aussi à cinq ans l’interdiction de pénétrer à nouveau sur le territoire de l’UE pour les immigrants illégaux.

Préalable au « Pacte européen pour l’immigration et l’asile », la Directive retour a été adoptée le 18 juin au Parlement européen [7]

B/ Le « Pacte européen pour l’immigration et l’asile »

Le Gouvernement français ayant fait de l’unification de la politique européenne en matière d’immigration une de ses priorités, la France souhaitait parvenir à un "pacte sur l’immigration" dès son accession à la Présidence de l’UE le 1er juillet 2008 [8].

Finalisé par tous les ministres de l’Intérieur de l’UE, les 7 et 8 juillet, à Cannes en France, le texte du dit Pacte a été adopté par le Conseil européen le 16 octobre 2008, à Bruxelles.

Partant de la volonté de ‘’protéger l’Europe’’ – selon le président français, ‘’contre le réchauffement climatique, l’énergie chère et l’immigration irrégulière’’, notamment – ce texte se place dans une position de ‘’fermeture’’ – vis-à-vis des pays de départ des migrants irréguliers - en retenant la prééminence du principe de la ‘’Préférence communautaire’’ comme fondement politique et base de la nouvelle politique migratoire unifiée de l’Europe.

Se voulant un texte équilibré entre la volonté de ‘’lutte contre l’immigration illégale’’ et le souhait de ‘’favoriser les synergies entre les migrations et le développement’’, le projet de Pacte tel qu’il a été retenu se décline en 5 objectifs :

  • Organiser l’immigration légale : il s’agit ici pour les concepteurs du projet de tenir compte des besoins, des priorités et des capacités d’accueil déterminés par chaque Etat membre et de favoriser l’intégration. Le pacte appelle donc les 27 pays de l’Union à développer l’immigration professionnelle et à renforcer l’attractivité de l’UE pour les travailleurs très qualifiés. En matière d’emploi, la préférence communautaire devra être respectée. Enfin, avant d’accueillir des immigrés, les Etats devront s’assurer que ces derniers disposent de revenus nécessaires pour s’installer dans le pays d’accueil et d’un niveau de langue suffisant pour s’y intégrer.
  • Lutter contre l’immigration illégale : l’objectif est d’assurer le retour des étrangers en situation irrégulière dans leur pays d’origine ou vers un pays de transit. Les pays de l’UE devront ainsi coordonner leurs actions et renoncer aux "régularisations générales". Par ailleurs, des accords de réadmission seront conclus "avec les pays pour lesquels c’est nécessaire".
  • Renforcer l’efficacité des contrôles aux frontières : dans cette optique, la France a demandé à ses partenaires européens de s’engager à généraliser la délivrance de visas biométriques au plus tard le 1er janvier 2012 et de renforcer les moyens de l’agence Frontex [9], chargée de coordonner l’action des polices aux frontières.
  • Bâtir une "Europe de l’asile" : à partir de 2009, un bureau dont la mission sera de faciliter les échanges d’information sera mis en place. La Commission est par ailleurs invitée à formuler des propositions afin d’instaurer en 2012 une "procédure d’asile unique" et d’adopter "des statuts uniformes de réfugiés".
  • Mettre l’accent sur le co-développement : le Conseil européen s’engage à soutenir le développement des pays concernés et à bâtir avec eux un partenariat étroit pour favoriser les « synergies entre les migrations » et le développement harmonieux des pays d’origine.

Une lecture rapide des clauses de ce pacte induit les principaux commentaires suivants :

  • Ce pacte porte très nettement le sceau de l’ancien ministre de l’Intérieur et actuel président français ; il est fortement teinté d’idéologie ‘’sécuritaire’’ et basé sur une approche unidimensionnelle, où, par exemple, les effets négatifs sur les pays de départ des migrants de la mondialisation et/ou des accords d’association signés par l’UE avec différents pays du sud ne sont nulle part pris en considération, ou à tout le moins mentionnés.
  • Ce pacte va à l’encontre du cours de l’histoire et des appels à l’ouverture et à la libéralisation des échanges, économiques, financiers et humains théoriquement inscrite dans la philosophie qui est à l’origine, par exemple, de la constitution de l’Organisation mondiale du commerce. La référence qu’il comporte à la « préférence communautaire » en plus d’être politiquement et idéologiquement dangereuse, est erronée dans les faits. Un pays comme la France, par exemple, reçoit près de 3 fois de ressources financières de ses résidents à l’étranger que n’en reçoit le Maroc [10]. Elle pourrait aussi impliquer une réponse des parties ainsi visées, particulièrement en Afrique. Que dirait-on ainsi en Europe si des pays comme le Maroc, le Sénégal ou l’Egypte, arguant de la « préférence nationale » commencent à revenir sur les opérations de privatisation, par exemple ? Les « dents » [11] ne suffiraient pas alors pour trouver les points de croissance qui manqueraient aux économies européennes après le déclenchement d’un tel processus un peu partout où des pays de l’UE ont des intérêts.
  • Ce pacte est, dans le même sens, fortement déséquilibré. L’objectif du co-développement avancé comme un moyen de résorber les migrations irrégulières directement dans les régions de départ ne figure que pour quelques lignes dans un document de 7 pages. Par ailleurs, ce même objectif comporte dans sa rédaction une contradiction centrale puisque, alors que le pacte dans son ensemble voudrait réduire dans l’absolu les flux de migrations des hommes du sud vers le nord, il fait paradoxalement des migrations un instrument de développement. Ainsi, alors même qu’on demande explicitement aux gouvernements des pays du sud – africains, en l’occurrence - de tout mettre en œuvre pour réduire l’émigration de leurs citoyens, on leur conseille de fonder leurs politiques de développement sur les ressources transférées par leurs mêmes migrants.
  • Ce pacte est fondé sur une approche extrêmement égoïste des relations internationales, y compris entre pays riches et pays pauvres. Il voudrait – sans contrepartie sérieuse sur le plan, par exemple, du rééquilibrage des relations économiques et financières entre ces mêmes pays – que les pays de départ et de transit opèrent, s’agissant de la question migratoire au seul profit de l’UE et de ses pays membres.

17 octobre 2008

Mehdi Lahlou

NOTES

[1] Où il a officié entre avril 2002 et mars 2004 puis entre juin 2005 et mars 2007

[2] De ce point de vue – et pas seulement – il ressemble beaucoup dans ses convictions et sa démarche à l’ancien président du Conseil espagnol, José Maria Aznar.

[3] http://www.interieur.gouv.fr, le 7 mars 2007.

[4] 28 juillet 2008. African Press Organization (APO)/

[5] Idem

[6] Le Président bolivien, Evo Morales, qualifiera la « directive retour » de « directive de la honte ». http://contreinfo.info/article.php3....

[7] Le texte de la directive a été approuvé par 367 voix contre 206 et 109 abstentions. Les amendements proposés par les opposants au texte ont été à chaque fois rejetés avec des écarts de plus de 100 voix. Le Monde, journal, numéro daté du 18 juin 2008

[8] ‘’Maintenant, on attend de l’Europe qu’elle protège les Européens contre les risques de la mondialisation’’. N. Sarkosy, président français. Dans un entretien sur la chaîne de télévision française, France 3, le 30/6/08. http://la-croix.com/article

[9] Agence de protection des frontières extérieures de l’Europe, instituée en octobre 2005, dont le siège se trouve à Varsovie.

[10] La France a ainsi reçu un montant égal à 12,5 milliards de dollars américains au titre des transferts d’épargne opérés en 2007 par ses résidents à l’étranger, lorsque le Maroc n’en a reçu que 5,7 milliards de dollars. http://siteresources.worldbank.org.

[11] Selon l’expression du président français qui a soutenu, début 2008, vouloir aller chercher « avec les dents » le point de croissance qui manque à son pays. http://www.lepoint.fr/actualites-po...

 

[TERRA- Quotidien]

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 07:09

 

IMMIGRATION/INTEGRATION : POUR UNE POLITIQUE DE GAUCHE

mardi 17 mai 2011 par Fatiha Mlati

 

Le centième numéro de la banquise est publié à un moment où le débat public en France sur le thème de l’immigration est violent. Certes une petite pause est certes opéré en raison de ce qu’on appelle « l’affaire DSK » (qui faisait partie de mes favoris et que je continue à soutenir …). Mais que l’on ne se trompe pas. cette question fortement instrumentalisée, le sera encore plus dans les prochains mois, présidentielle oblige ! Le thème de l’intégration n’y échappe pas. Cette situation suscite des inquiétudes et des frustrations quant à la réalité des politiques publiques menées en la matière.

Frustrations pour les professionnels intervenants sur le terrain de l’intégration. En effet, ces derniers constatent chaque jour certaines incohérences. Déperdition des savoirs et savoirs faire des migrants, difficultés dans l’accès aux droits, relégation dans certains quartiers….

 

Inquiétudes pour les citoyens que nous sommes. Finalement très peu d’enseignements ont été tirés du séisme politique de 2002. Bien au contraire.

Aujourd’hui, nous avons la montée en puissance d’un discours qui va jusqu’à instrumentaliser y compris les travaux de chercheurs pour alimenter ce qui est devenu un mythe supplémentaire : l’intégration serait un échec. Le mot échec s’entend comme l’impossibilité pour des populations venues d’ailleurs de s’intégrer sous divers motifs culturels, religieux….

 

On observe encore aujourd’hui que malgré les clarifications apportées par divers travaux et plus particulièrement ceux du Haut Conseil à l’Intégration (HCI), une ambivalence permanente dans le débat publique est de mise sur les termes à adopter (insertion, intégration ou assimilation), sur les catégories concernées (primo arrivants, immigrés, enfants issus de l’immigration).

On observe également si on examine, très rapidement, les quarante dernières années que l’histoire est marquée par quelques avancées mais surtout de nombreuses occasions manquées.

 

Rappelons qu’un impensé politique a marqué les années soixante dix celui du mythe du retour. Ceci nous a empêchés de mesurer les conséquences du passage de l’immigration de l’homme seul à l’immigration familiale. Cette impensé a retardé la mise en place de politiques publiques d’accompagnement des migrations de peuplement. Sans doute, nous en payons encore aujourd’hui le prix.

 

Rappelons également que les luttes pour l’égalité des droits des années quatre vingt ont aboutit à une réponse marquée par une approche morale et anti raciste, sans doute nécessaire, mais insuffisante. Cette approche a occulté la nécessité de bâtir des réponses fortes aux enjeux posés par les générations issus de l’immigration.

 

Rappelons enfin que la montée en puissance des problématiques liées aux déplacements de frontière des années deux mille a laissé la place au concept de partage du fardeau et d’’Europe forteresse. Ceci a occulté la nécessité à la fois de penser les migrations à l’échelle européennes, de repenser les politiques de développement et de mobilité entre ensembles régionaux par exemple euro méditerranéen.

 

Ainsi après la montée en puissance des problématiques sécuritaires de la fin des années 2000, nous assistons aujourd’hui à l’émergence d’un récit sur l’échec de l’intégration.

Mais de qui parle-t-on ? Le plus souvent des jeunes des cités populaires exclus du marché du travail, relégués dans des zones de ségrégation territoriales ? Sont-ils concernés par l’intégration ? A l’évidence non. Ils sont français.

 

Le récit sur l’échec de l’intégration ne prend pas en compte que le modèle d’intégration s’il peut apparaitre parfois grippé, il est avant tout en raison d’absence de perspectives, secoués par les crises sociales et économiques successives. Ce récit ne prend pas en compte que l’analyse des trajectoires des migrants ne peut se faire en occultant la question sociale.

 

Le récit de l’échec occulte le fait que l’analyse des dysfonctionnements de l’intégration est le miroir de l’abandon progressif de notre modèle social. C’est dans ce contexte de crise durable qui sévit un peu partout en Europe, du recul de l’Etat social de droit que le préjudice est toujours renvoyé à l’étranger, au pauvre, toujours soupçonné de ne pas vouloir s’intégrer, de ne pas vouloir faire d’efforts, sans jamais mettre au cœur de l’analyse la dialectique objectifs et moyens, sans interroger les outils vecteur d’intégration (dispositif d’apprentissage de la langue, état du marché du travail, état du logement social, discriminations à l’embauche…la place et le rôle respectifs des services publics, de la société civile) et les moyens dont ceux ci disposent pour leur insertion sociale et professionnelle. Dans ce sens les étrangers sont soumis aux mêmes difficultés que l’ensemble des désaffiliés que compte notre pays.

 

Le refus d’adopter une position apaisée sur cette question explique les résultats mitigés du MIPEX III pour la France. Ils reflètent clairement les injonctions contradictoires des politiques d’accueil et d’intégration, depuis plusieurs années, sur quasiment l’ensemble des thématiques étudiées.

 

Les enseignements de l’étude MIPEX montrent globalement que rares sont les pays qui fondent les évolutions de leurs politiques d’intégration sur des éléments concrets, sans prisme idéologique. Elle montre également que pour notamment la France nous sommes loin de l’égalité de traitement, valeur fondamentale de notre République.

 

Examinons quelques indicateurs du MIPEX en fonction des réalités d’aujourd’hui :

La « résidence de longue durée » :

On observe que la France arrive en queue de peloton des pays européen.

Effectivement, un changement de logique majeur est intervenu. L’accès simplifié et dans un délai raisonnable au séjour permanent hérité des années quatre vingt a été remplacé par une politique de précarisation des titres. C’est une évidence qu’un titre de séjour d’une durée de douze mois rend plus difficile par exemple l’accès à l’emploi pérenne, au logement stable, à un crédit bancaire.

 

Par ailleurs, le renouvellement du titre de séjour temporaire et du titre de résident permanent est subordonné au respect du Contrat d’Accueil et d’Intégration. Le CAI est une disposition à priori positive. Elle peut être analysée comme une avancée, la reconnaissance que le migrant a vocation à s’installer durablement sur le territoire national.

 

En pratique, le CAI est vécu pour beaucoup comme une formalité administrative, parfois incomprise et suscitant la confusion. Mais surtout sa signature est un préalable à l’intégration. Le CAI devrait venir valider un parcours.

Sa portée est affaiblit également par ce que l’on nomme le « faisceau d’indice sociaux et professionnels ». Il y a un risque de maintien dans la précarité d’une population a priori fragile.

 

La question qui se pose alors est la suivante : sur quel base le motif de « défaut d’intégration » constaté par les services d’une Préfecture lors d’une demande d’octroie d’une carte de séjour peut être prononcé ? La pratique nous enseigne que le « faisceau d’indices » recoupe souvent les paramètres tels que la maîtrise de la langue, l’accès marché du travail, au logement, au respect des valeurs républicaines et de la loi. Certains paramètres nous paraissent évidents. Ils s’appuient sur la volonté de s’intégrer du requérant (notamment ceux liés au respect des valeurs républicaines) mais certains, comme l’accès à un logement, à un emploi dépendent de l’état du contexte économique et sociale. Ne nous pouvons pas en faire porter le seul préjudice à l’étranger.

 

La mobilité sur le marché du travail :

Les immigrés subissent un taux chômage dépassant les 20%. Or la 1ère des raisons est qu’une large partie du marché du travail (plus de 6 millions de postes) leur sont fermés. Lorsque l’on examine les modalités d’accès au marché du travail des primo arrivants on constate une surreprésentation dans les métiers dit sous tensions. Fort bien. Or on constate que le bilan de compétences mise en place dans le cadre du Contrat d’accueil et d’Intégration se conclut le plus souvent par une orientation vers ce type de secteur. Ne devons pas attendre un peu plus de cette mesure. En effet, l’impact potentiel du bilan sur le parcours professionnel du migrant est très limité. L’absence d’une réflexion sur les conditions de transferts des compétences acquises dans le pays d’origine et de simplification des procédures de reconnaissance des diplômes amenuise les possibilités de progression sur le plan professionnel.

 

Le regroupement familial

Parmi les 31 pays étudiés, la France a l’une des législations les plus restrictives. Or, nul ne peut contester que vivre en famille être un facteur d’intégration.

A l’aube d’une nouvelle présidentielle, il est urgent que ces questions soient traitées dans un climat apaisé. Nous attendons de la gauche qu’elle porte une véritable vision en la matière. Voici les principaux chantiers à mettre en place afin de ne changer le court des choses :

 

Organisation de la politique d’accueil et d’intégration

Effectuer un audit politique accueil afin de mesurer les effets de la RGPP et redéfinir des dispositions en matière de conditions d’entrées et de séjour, d’intégration dans une vision d’intérêt partagé.

 

Sécurisation des parcours de séjour

Il faut plaider pour la mise en place d’une carte de résident permanent au bout de 3 ans avec la signature du à l’issue. En effet, le CAI ne doit pas être pas un préalable à l’intégration mais s’inscrire dans un processus qui se construit dans le temps.

 

Protéger l’unité familiale

Il s’agit de procéder à la révision des procédures de regroupement familiale (trop longue, arbitraire, opaque, contre productif)

 

Renforcer la politique linguistique

Il faut abandonner les tests et module dans les pays d’origine qui sont dispendieux et inefficace afin de réorienter les moyens pour renforcer les dispositifs dans le pays d’accueil. il s’agit également d’augmenter les exigences du niveau requis (trop bas) afin de bénéficier d’une formation linguistique et abonner le seul objectif de maitrise de la langue à usage social.

 

En finir avec les discriminations légales

Il faudra ouvrir les discussions avec les partenaires sociaux sur le dossier des emplois publics non accessibles aux étrangers en limitant cette interdiction aux seuls secteurs stratégiques. Mais il faudra également ouvrir le débat pour la mise en place d’un fonds employeur pour les étrangers régularisé victimes de l’économie parallèle (financement de la formation notamment).

 

Répartition et mixité des territoires

L’intégration passe également par une meilleure répartition des étrangers notamment primo arrivants. Nous ne pouvons laisser se renforcer la ghettoïsation et le communautarisme. Le socle du vivre ensemble est la mixité sociale, territoriale, identitaire.. ;

 

Accorder la citoyenneté de résidence

L’argument que la France ne serait pas prête, que la montée du Front National ne sont plus d’actualité. Cet argument que cela avantagerait la gauche est erroné : les expériences électorales dans les pays européens, ayant accordé le droit de vote à leurs ressortissants étrangers montrent que leur vote se répartit sur l’ensemble de l’échiquier politique. Le droit de vote serait un signe de reconnaissance donné aux premières générations bien plus efficace que toute velléités de repentance sur je ne sais qu’elle traumatisme de l’histoire.

La Gauche Cactus

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