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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 21:50

octobre 2008

Mehdi Lahlou
De la « directive retour » au « pacte sur l’immigration », la forteresse Europe se construit face au Sud

 

auteur

Medhi Lahlou est Professeur de sciences économiques à l’Institut National de Statistiques et d’Economie Appliquées (INSEA), Rabat, Maroc. Ses recherches portent sur les migrations, le travail des enfants , l’économie marocaine et la politique de l’eau. Il a réalisé 2 enquêtes : ’’Migrations de transit au Maroc’’ et ’’Migrations des Marocains’’. Il réalise dans le cadre du projet RUIG (en partenariat avec Marie Claire Caloz-Tshopp de l’Université de Genève), (...)

Le Gouvernement français ayant fait de l’unification de la politique européenne en matière d’immigration une de ses priorités, la France souhaitait parvenir à un "pacte sur l’immigration" dès son accession à la Présidence de l’UE le 1er juillet 2008 [8]. Finalisé par tous les ministres de l’Intérieur de l’UE, les 7 et 8 juillet, à Cannes en France, le texte du dit Pacte a été adopté par le Conseil européen le 16 octobre 2008, à Bruxelles. Partant de la volonté de ‘’protéger l’Europe’’ – selon le président français, ‘’contre le réchauffement climatique, l’énergie chère et l’immigration irrégulière’’, notamment – ce texte se place dans une position de ‘’fermeture’’ – vis-à-vis des pays de départ des migrants irréguliers - en retenant la prééminence du principe de la ‘’Préférence communautaire’’ comme fondement politique et base de la nouvelle politique migratoire unifiée de l’Europe.

 

Mehdi Lahlou, "De la « directive retour » au « pacte sur l’immigration », la forteresse Europe se construit face au Sud", Recueil Alexandries, Collections Reflets, octobre 2008, url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article834.html

C’est connu, Nicolas Sarkosy actuel Président français et Président de l’Union européenne jusqu’à fin décembre 2008, a constitué son fonds de commerce électoral au Ministère de l’Intérieur [1] de son pays, en orientant son action et sa virulence, principalement sur le thème de la sécurité et la question migratoire [2].

A la veille d’être élu à l’Elysée, il soutenait en particulier que ‘’La politique de l’immigration doit être au premier rang sur notre agenda national, sur notre agenda européen, sur notre agenda méditerranéen, sur notre agenda international’’, il annonçait par la même occasion, le 5 mars 2007 à Marseille - ville symbole du ‘’problème’’ qu’il veut résoudre - que, en tant justement que ministre de l’intérieur de la France, il était parvenu à réaliser 3 ‘’ruptures’’ [3] :

* Première rupture : la procédure de demande d’asile n’est plus une "fabrique à clandestins".

* Deuxième rupture : nous avons raccompagné dans leurs pays d’origine plusieurs dizaines de milliers d’étrangers.

* Troisième rupture : nous avons commencé à choisir les flux d’immigration légale vers notre pays, en réorientant la politique de délivrance des visas et des cartes de séjour.

Devenu Président à partir de mai 2007, son bilan à ce sujet est conforme à ses projets, autant sur le plan national que européen.

A l’échelle de la France, 3 éléments/réalisations sont à relever [4] :

a/ Au niveau institutionnel, il crée dès son arrivée à l’Elysée un nouveau ministère, celui de « la Migration et de l’identité nationale ». Pour la première fois dans l’histoire de la France, un ministère de plein exercice s’est vu ainsi confier la responsabilité de gérer l’ensemble du parcours d’un « étranger candidat à l’immigration ». En réalité, en faisant un amalgame entre migration et identité nationale, ce Ministère – chargé dans les faits de la police et de la « chasse » des migrants - paraît être d’abord un gage vis-à-vis de l’extrême droite, dont les voix ont beaucoup compté dans l’élection de N. Sarkosy.

b/ Le deuxième élément a consisté, en vertu du « principe de souveraineté », de mettre en place les moyens d’une ‘’immigration sélective’’ pour que la France puisse « choisir qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire ».

c/ La troisième réalisation est d’ordre quantitatif. Elle se rattache à une « performance » numérique, celle qui fait du nombre de « reconduites à la frontière » un indicateur de bonne politique. Ainsi, du 1er juin 2007 au 31 mai 2008, 29.729 immigrés clandestins ont été reconduits dans leur pays d’origine, soit une augmentation sans précédent – selon les termes du Ministre français de l’Immigration et de l’identité nationale - de 31 % par rapport à la période précédente. Et « la tendance est similaire pour les cinq premiers mois de l’année (2008) ». En outre, toujours selon le même ministre, « le nombre d’étrangers en situation irrégulière acceptant un départ volontaire progresse : il a été multiplié par près de cinq en un an - plus 374 %. Outre l’encouragement financier, les intéressés comprennent qu’ils ont intérêt à respecter les règles et à repartir dans leur pays avec un projet professionnel, dans la dignité » [5].

Au niveau européen, le président français va mettre une plus grande pression sur ses pairs de l’UE – sur l’Italie et l’Espagne, notamment – pour accélérer la cadence en matière de politique migratoire européenne, pour aller dans le même sens que le nouveau exécutif français

A/ La « Directive retour » :

En ce sens, les 27 ministres de l’Intérieur de l’Union européenne, réunis le 5 juin à Luxembourg, sont tombés d’accord sur la « Directive retour ». Celle-ci – qui va provoquer un tollé de protestations au sein de la société civile européenne et de la part de nombreux chefs d’Etat africains et latino-américains [6] - prévoit notamment "l’unification des normes et des procédures relatives au retour des ressortissants des pays tiers résidant illégalement sur le territoire des Etats membres".

Ce texte fixe, entre autres, à dix-huit mois la durée maximale de détention des immigrés illégaux avant leur expulsion : un maximum de six mois, dans un premier temps, pouvant être prolongé de douze mois dans certaines circonstances, par exemple le manque de coopération du pays d’origine du migrant qui refuserait d’accepter son retour. Il fixe aussi à cinq ans l’interdiction de pénétrer à nouveau sur le territoire de l’UE pour les immigrants illégaux.

Préalable au « Pacte européen pour l’immigration et l’asile », la Directive retour a été adoptée le 18 juin au Parlement européen [7]

B/ Le « Pacte européen pour l’immigration et l’asile »

Le Gouvernement français ayant fait de l’unification de la politique européenne en matière d’immigration une de ses priorités, la France souhaitait parvenir à un "pacte sur l’immigration" dès son accession à la Présidence de l’UE le 1er juillet 2008 [8].

Finalisé par tous les ministres de l’Intérieur de l’UE, les 7 et 8 juillet, à Cannes en France, le texte du dit Pacte a été adopté par le Conseil européen le 16 octobre 2008, à Bruxelles.

Partant de la volonté de ‘’protéger l’Europe’’ – selon le président français, ‘’contre le réchauffement climatique, l’énergie chère et l’immigration irrégulière’’, notamment – ce texte se place dans une position de ‘’fermeture’’ – vis-à-vis des pays de départ des migrants irréguliers - en retenant la prééminence du principe de la ‘’Préférence communautaire’’ comme fondement politique et base de la nouvelle politique migratoire unifiée de l’Europe.

Se voulant un texte équilibré entre la volonté de ‘’lutte contre l’immigration illégale’’ et le souhait de ‘’favoriser les synergies entre les migrations et le développement’’, le projet de Pacte tel qu’il a été retenu se décline en 5 objectifs :

  • Organiser l’immigration légale : il s’agit ici pour les concepteurs du projet de tenir compte des besoins, des priorités et des capacités d’accueil déterminés par chaque Etat membre et de favoriser l’intégration. Le pacte appelle donc les 27 pays de l’Union à développer l’immigration professionnelle et à renforcer l’attractivité de l’UE pour les travailleurs très qualifiés. En matière d’emploi, la préférence communautaire devra être respectée. Enfin, avant d’accueillir des immigrés, les Etats devront s’assurer que ces derniers disposent de revenus nécessaires pour s’installer dans le pays d’accueil et d’un niveau de langue suffisant pour s’y intégrer.
  • Lutter contre l’immigration illégale : l’objectif est d’assurer le retour des étrangers en situation irrégulière dans leur pays d’origine ou vers un pays de transit. Les pays de l’UE devront ainsi coordonner leurs actions et renoncer aux "régularisations générales". Par ailleurs, des accords de réadmission seront conclus "avec les pays pour lesquels c’est nécessaire".
  • Renforcer l’efficacité des contrôles aux frontières : dans cette optique, la France a demandé à ses partenaires européens de s’engager à généraliser la délivrance de visas biométriques au plus tard le 1er janvier 2012 et de renforcer les moyens de l’agence Frontex [9], chargée de coordonner l’action des polices aux frontières.
  • Bâtir une "Europe de l’asile" : à partir de 2009, un bureau dont la mission sera de faciliter les échanges d’information sera mis en place. La Commission est par ailleurs invitée à formuler des propositions afin d’instaurer en 2012 une "procédure d’asile unique" et d’adopter "des statuts uniformes de réfugiés".
  • Mettre l’accent sur le co-développement : le Conseil européen s’engage à soutenir le développement des pays concernés et à bâtir avec eux un partenariat étroit pour favoriser les « synergies entre les migrations » et le développement harmonieux des pays d’origine.

Une lecture rapide des clauses de ce pacte induit les principaux commentaires suivants :

  • Ce pacte porte très nettement le sceau de l’ancien ministre de l’Intérieur et actuel président français ; il est fortement teinté d’idéologie ‘’sécuritaire’’ et basé sur une approche unidimensionnelle, où, par exemple, les effets négatifs sur les pays de départ des migrants de la mondialisation et/ou des accords d’association signés par l’UE avec différents pays du sud ne sont nulle part pris en considération, ou à tout le moins mentionnés.
  • Ce pacte va à l’encontre du cours de l’histoire et des appels à l’ouverture et à la libéralisation des échanges, économiques, financiers et humains théoriquement inscrite dans la philosophie qui est à l’origine, par exemple, de la constitution de l’Organisation mondiale du commerce. La référence qu’il comporte à la « préférence communautaire » en plus d’être politiquement et idéologiquement dangereuse, est erronée dans les faits. Un pays comme la France, par exemple, reçoit près de 3 fois de ressources financières de ses résidents à l’étranger que n’en reçoit le Maroc [10]. Elle pourrait aussi impliquer une réponse des parties ainsi visées, particulièrement en Afrique. Que dirait-on ainsi en Europe si des pays comme le Maroc, le Sénégal ou l’Egypte, arguant de la « préférence nationale » commencent à revenir sur les opérations de privatisation, par exemple ? Les « dents » [11] ne suffiraient pas alors pour trouver les points de croissance qui manqueraient aux économies européennes après le déclenchement d’un tel processus un peu partout où des pays de l’UE ont des intérêts.
  • Ce pacte est, dans le même sens, fortement déséquilibré. L’objectif du co-développement avancé comme un moyen de résorber les migrations irrégulières directement dans les régions de départ ne figure que pour quelques lignes dans un document de 7 pages. Par ailleurs, ce même objectif comporte dans sa rédaction une contradiction centrale puisque, alors que le pacte dans son ensemble voudrait réduire dans l’absolu les flux de migrations des hommes du sud vers le nord, il fait paradoxalement des migrations un instrument de développement. Ainsi, alors même qu’on demande explicitement aux gouvernements des pays du sud – africains, en l’occurrence - de tout mettre en œuvre pour réduire l’émigration de leurs citoyens, on leur conseille de fonder leurs politiques de développement sur les ressources transférées par leurs mêmes migrants.
  • Ce pacte est fondé sur une approche extrêmement égoïste des relations internationales, y compris entre pays riches et pays pauvres. Il voudrait – sans contrepartie sérieuse sur le plan, par exemple, du rééquilibrage des relations économiques et financières entre ces mêmes pays – que les pays de départ et de transit opèrent, s’agissant de la question migratoire au seul profit de l’UE et de ses pays membres.

17 octobre 2008

Mehdi Lahlou

NOTES

[1] Où il a officié entre avril 2002 et mars 2004 puis entre juin 2005 et mars 2007

[2] De ce point de vue – et pas seulement – il ressemble beaucoup dans ses convictions et sa démarche à l’ancien président du Conseil espagnol, José Maria Aznar.

[3] http://www.interieur.gouv.fr, le 7 mars 2007.

[4] 28 juillet 2008. African Press Organization (APO)/

[5] Idem

[6] Le Président bolivien, Evo Morales, qualifiera la « directive retour » de « directive de la honte ». http://contreinfo.info/article.php3....

[7] Le texte de la directive a été approuvé par 367 voix contre 206 et 109 abstentions. Les amendements proposés par les opposants au texte ont été à chaque fois rejetés avec des écarts de plus de 100 voix. Le Monde, journal, numéro daté du 18 juin 2008

[8] ‘’Maintenant, on attend de l’Europe qu’elle protège les Européens contre les risques de la mondialisation’’. N. Sarkosy, président français. Dans un entretien sur la chaîne de télévision française, France 3, le 30/6/08. http://la-croix.com/article

[9] Agence de protection des frontières extérieures de l’Europe, instituée en octobre 2005, dont le siège se trouve à Varsovie.

[10] La France a ainsi reçu un montant égal à 12,5 milliards de dollars américains au titre des transferts d’épargne opérés en 2007 par ses résidents à l’étranger, lorsque le Maroc n’en a reçu que 5,7 milliards de dollars. http://siteresources.worldbank.org.

[11] Selon l’expression du président français qui a soutenu, début 2008, vouloir aller chercher « avec les dents » le point de croissance qui manque à son pays. http://www.lepoint.fr/actualites-po...

 

[TERRA- Quotidien]

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 21:48

Le MRAP exprime sa pleine solidarité avec la jeune policière Sihem Souid après son passage en conseil de discipline


Le MRAP était présent ce matin, mardi 24 mai 2011, rue Nelaton (75015
Paris), en soutien à la jeune policière Sihem Souid qui passait en
Conseil de discipline pour avoir osé dénoncer dans son livre Omerta dans
la Police des manquements graves à la L3oi et à l’éthique commis au sein
de la police Nationale, tout particulièrement par certains membres de la
Police de l’air et des frontières d’Orly.

Le MRAP a appris de ses avocats Me Bourdon et Me Dubreuil que le conseil
avait proposé une exclusion temporaire de fonction de 18 mois dont 6
avec sursis. C’est au Ministre de l’Intérieur qu’il appartient
maintenant de décider si il va suivre ou non cette proposition.

Le MRAP partage l’indignation des avocats de Sihem Souid face à une
proposition qui méconnaît le droit à la liberté d’expression des
fonctionnaires telle que reconnue par le Droit Européen.

Le MRAP en appelle au Ministre de l’Intérieur pour qu’il choisisse la
solution d’« apaisement », demandée par Me Bourdon et Me Dubreuil, qui
seule peut répondre au choix citoyen, courageux et exemplaire, de Sihem
Souid, qui ne peut que servir la Justice et l’Etat de Droit.


Paris, le 24 mai 2011.

--
Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples
43 bd Magenta - 75010 Paris -

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 07:39

                                                                            

         Confédération Paysanne                                              
                               

 

Procès de Lactalis contre la Confédération Paysanne de la Loire :

Tous à Saint-Etienne le 1er juin 2011 pour défendre la liberté syndicale

 

 

Mercredi 1er juin, au Tribunal de St-Etienne, le géant de l'industrie laitière Lactalis - 3ème groupe laitier mondial, 126 laiteries dans 24 pays, un chiffre d'affaires de 9,4 milliards d'euros, des profits tenus secrets ; et qui collecte la moitié du lait dans la Loire - prétend faire condamner le syndicat Confédération paysanne et son secrétaire général de l’époque Philippe Marquet, paysan éleveur laitier, pour des actions menées en 2009 contre l'effondrement du prix du lait (payé alors entre 22 et 26 centimes d'euros le litre !), et exige d'eux 14 000 euros de dommages et intérêts.

 

Dans les départements de la Loire et du Rhône - qui comptent encore 3000 éleveurs laitiers - les actions ont été nombreuses en  2009 au moment de "la grève du lait". Deux ans après, les choses ne se sont guère arrangées, et en plus voilà que Lactalis veut faire condamner les paysans pour le blocage de son usine d'Andrézieux-Bouthéon. Tout le monde comprend bien qu’il s’agit en réalité de mater ceux qui défendent l'agriculture paysanne, et de décourager toute idée de résistance.

 

 

Un comité de soutien se mobilise pour soutenir la Confédération paysanne et son secrétaire général.

 

Le 1er juin 2011, un grand rassemblement aura lieu de 10h à 22h place Jean Jaurès à St-Etienne. A 12h, la manifestation se dirigera vers le Tribunal de Grande Instance.

Dans l'après-midi, auront lieu des débats et des interventions de soutien.

 

Tous ceux qui défendent la liberté d’action syndicale sont invités à nous rejoindre.

 

 

Contacts :

 

Blandine Drevet-Odouard : 06 42 51 66 32 – Marc Touplin : 06 88 28 14 70

Jean Guinand :06 66 20 26 67 – François Pitaval : 06 65 24 75 80

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 07:09

 

IMMIGRATION/INTEGRATION : POUR UNE POLITIQUE DE GAUCHE

mardi 17 mai 2011 par Fatiha Mlati

 

Le centième numéro de la banquise est publié à un moment où le débat public en France sur le thème de l’immigration est violent. Certes une petite pause est certes opéré en raison de ce qu’on appelle « l’affaire DSK » (qui faisait partie de mes favoris et que je continue à soutenir …). Mais que l’on ne se trompe pas. cette question fortement instrumentalisée, le sera encore plus dans les prochains mois, présidentielle oblige ! Le thème de l’intégration n’y échappe pas. Cette situation suscite des inquiétudes et des frustrations quant à la réalité des politiques publiques menées en la matière.

Frustrations pour les professionnels intervenants sur le terrain de l’intégration. En effet, ces derniers constatent chaque jour certaines incohérences. Déperdition des savoirs et savoirs faire des migrants, difficultés dans l’accès aux droits, relégation dans certains quartiers….

 

Inquiétudes pour les citoyens que nous sommes. Finalement très peu d’enseignements ont été tirés du séisme politique de 2002. Bien au contraire.

Aujourd’hui, nous avons la montée en puissance d’un discours qui va jusqu’à instrumentaliser y compris les travaux de chercheurs pour alimenter ce qui est devenu un mythe supplémentaire : l’intégration serait un échec. Le mot échec s’entend comme l’impossibilité pour des populations venues d’ailleurs de s’intégrer sous divers motifs culturels, religieux….

 

On observe encore aujourd’hui que malgré les clarifications apportées par divers travaux et plus particulièrement ceux du Haut Conseil à l’Intégration (HCI), une ambivalence permanente dans le débat publique est de mise sur les termes à adopter (insertion, intégration ou assimilation), sur les catégories concernées (primo arrivants, immigrés, enfants issus de l’immigration).

On observe également si on examine, très rapidement, les quarante dernières années que l’histoire est marquée par quelques avancées mais surtout de nombreuses occasions manquées.

 

Rappelons qu’un impensé politique a marqué les années soixante dix celui du mythe du retour. Ceci nous a empêchés de mesurer les conséquences du passage de l’immigration de l’homme seul à l’immigration familiale. Cette impensé a retardé la mise en place de politiques publiques d’accompagnement des migrations de peuplement. Sans doute, nous en payons encore aujourd’hui le prix.

 

Rappelons également que les luttes pour l’égalité des droits des années quatre vingt ont aboutit à une réponse marquée par une approche morale et anti raciste, sans doute nécessaire, mais insuffisante. Cette approche a occulté la nécessité de bâtir des réponses fortes aux enjeux posés par les générations issus de l’immigration.

 

Rappelons enfin que la montée en puissance des problématiques liées aux déplacements de frontière des années deux mille a laissé la place au concept de partage du fardeau et d’’Europe forteresse. Ceci a occulté la nécessité à la fois de penser les migrations à l’échelle européennes, de repenser les politiques de développement et de mobilité entre ensembles régionaux par exemple euro méditerranéen.

 

Ainsi après la montée en puissance des problématiques sécuritaires de la fin des années 2000, nous assistons aujourd’hui à l’émergence d’un récit sur l’échec de l’intégration.

Mais de qui parle-t-on ? Le plus souvent des jeunes des cités populaires exclus du marché du travail, relégués dans des zones de ségrégation territoriales ? Sont-ils concernés par l’intégration ? A l’évidence non. Ils sont français.

 

Le récit sur l’échec de l’intégration ne prend pas en compte que le modèle d’intégration s’il peut apparaitre parfois grippé, il est avant tout en raison d’absence de perspectives, secoués par les crises sociales et économiques successives. Ce récit ne prend pas en compte que l’analyse des trajectoires des migrants ne peut se faire en occultant la question sociale.

 

Le récit de l’échec occulte le fait que l’analyse des dysfonctionnements de l’intégration est le miroir de l’abandon progressif de notre modèle social. C’est dans ce contexte de crise durable qui sévit un peu partout en Europe, du recul de l’Etat social de droit que le préjudice est toujours renvoyé à l’étranger, au pauvre, toujours soupçonné de ne pas vouloir s’intégrer, de ne pas vouloir faire d’efforts, sans jamais mettre au cœur de l’analyse la dialectique objectifs et moyens, sans interroger les outils vecteur d’intégration (dispositif d’apprentissage de la langue, état du marché du travail, état du logement social, discriminations à l’embauche…la place et le rôle respectifs des services publics, de la société civile) et les moyens dont ceux ci disposent pour leur insertion sociale et professionnelle. Dans ce sens les étrangers sont soumis aux mêmes difficultés que l’ensemble des désaffiliés que compte notre pays.

 

Le refus d’adopter une position apaisée sur cette question explique les résultats mitigés du MIPEX III pour la France. Ils reflètent clairement les injonctions contradictoires des politiques d’accueil et d’intégration, depuis plusieurs années, sur quasiment l’ensemble des thématiques étudiées.

 

Les enseignements de l’étude MIPEX montrent globalement que rares sont les pays qui fondent les évolutions de leurs politiques d’intégration sur des éléments concrets, sans prisme idéologique. Elle montre également que pour notamment la France nous sommes loin de l’égalité de traitement, valeur fondamentale de notre République.

 

Examinons quelques indicateurs du MIPEX en fonction des réalités d’aujourd’hui :

La « résidence de longue durée » :

On observe que la France arrive en queue de peloton des pays européen.

Effectivement, un changement de logique majeur est intervenu. L’accès simplifié et dans un délai raisonnable au séjour permanent hérité des années quatre vingt a été remplacé par une politique de précarisation des titres. C’est une évidence qu’un titre de séjour d’une durée de douze mois rend plus difficile par exemple l’accès à l’emploi pérenne, au logement stable, à un crédit bancaire.

 

Par ailleurs, le renouvellement du titre de séjour temporaire et du titre de résident permanent est subordonné au respect du Contrat d’Accueil et d’Intégration. Le CAI est une disposition à priori positive. Elle peut être analysée comme une avancée, la reconnaissance que le migrant a vocation à s’installer durablement sur le territoire national.

 

En pratique, le CAI est vécu pour beaucoup comme une formalité administrative, parfois incomprise et suscitant la confusion. Mais surtout sa signature est un préalable à l’intégration. Le CAI devrait venir valider un parcours.

Sa portée est affaiblit également par ce que l’on nomme le « faisceau d’indice sociaux et professionnels ». Il y a un risque de maintien dans la précarité d’une population a priori fragile.

 

La question qui se pose alors est la suivante : sur quel base le motif de « défaut d’intégration » constaté par les services d’une Préfecture lors d’une demande d’octroie d’une carte de séjour peut être prononcé ? La pratique nous enseigne que le « faisceau d’indices » recoupe souvent les paramètres tels que la maîtrise de la langue, l’accès marché du travail, au logement, au respect des valeurs républicaines et de la loi. Certains paramètres nous paraissent évidents. Ils s’appuient sur la volonté de s’intégrer du requérant (notamment ceux liés au respect des valeurs républicaines) mais certains, comme l’accès à un logement, à un emploi dépendent de l’état du contexte économique et sociale. Ne nous pouvons pas en faire porter le seul préjudice à l’étranger.

 

La mobilité sur le marché du travail :

Les immigrés subissent un taux chômage dépassant les 20%. Or la 1ère des raisons est qu’une large partie du marché du travail (plus de 6 millions de postes) leur sont fermés. Lorsque l’on examine les modalités d’accès au marché du travail des primo arrivants on constate une surreprésentation dans les métiers dit sous tensions. Fort bien. Or on constate que le bilan de compétences mise en place dans le cadre du Contrat d’accueil et d’Intégration se conclut le plus souvent par une orientation vers ce type de secteur. Ne devons pas attendre un peu plus de cette mesure. En effet, l’impact potentiel du bilan sur le parcours professionnel du migrant est très limité. L’absence d’une réflexion sur les conditions de transferts des compétences acquises dans le pays d’origine et de simplification des procédures de reconnaissance des diplômes amenuise les possibilités de progression sur le plan professionnel.

 

Le regroupement familial

Parmi les 31 pays étudiés, la France a l’une des législations les plus restrictives. Or, nul ne peut contester que vivre en famille être un facteur d’intégration.

A l’aube d’une nouvelle présidentielle, il est urgent que ces questions soient traitées dans un climat apaisé. Nous attendons de la gauche qu’elle porte une véritable vision en la matière. Voici les principaux chantiers à mettre en place afin de ne changer le court des choses :

 

Organisation de la politique d’accueil et d’intégration

Effectuer un audit politique accueil afin de mesurer les effets de la RGPP et redéfinir des dispositions en matière de conditions d’entrées et de séjour, d’intégration dans une vision d’intérêt partagé.

 

Sécurisation des parcours de séjour

Il faut plaider pour la mise en place d’une carte de résident permanent au bout de 3 ans avec la signature du à l’issue. En effet, le CAI ne doit pas être pas un préalable à l’intégration mais s’inscrire dans un processus qui se construit dans le temps.

 

Protéger l’unité familiale

Il s’agit de procéder à la révision des procédures de regroupement familiale (trop longue, arbitraire, opaque, contre productif)

 

Renforcer la politique linguistique

Il faut abandonner les tests et module dans les pays d’origine qui sont dispendieux et inefficace afin de réorienter les moyens pour renforcer les dispositifs dans le pays d’accueil. il s’agit également d’augmenter les exigences du niveau requis (trop bas) afin de bénéficier d’une formation linguistique et abonner le seul objectif de maitrise de la langue à usage social.

 

En finir avec les discriminations légales

Il faudra ouvrir les discussions avec les partenaires sociaux sur le dossier des emplois publics non accessibles aux étrangers en limitant cette interdiction aux seuls secteurs stratégiques. Mais il faudra également ouvrir le débat pour la mise en place d’un fonds employeur pour les étrangers régularisé victimes de l’économie parallèle (financement de la formation notamment).

 

Répartition et mixité des territoires

L’intégration passe également par une meilleure répartition des étrangers notamment primo arrivants. Nous ne pouvons laisser se renforcer la ghettoïsation et le communautarisme. Le socle du vivre ensemble est la mixité sociale, territoriale, identitaire.. ;

 

Accorder la citoyenneté de résidence

L’argument que la France ne serait pas prête, que la montée du Front National ne sont plus d’actualité. Cet argument que cela avantagerait la gauche est erroné : les expériences électorales dans les pays européens, ayant accordé le droit de vote à leurs ressortissants étrangers montrent que leur vote se répartit sur l’ensemble de l’échiquier politique. Le droit de vote serait un signe de reconnaissance donné aux premières générations bien plus efficace que toute velléités de repentance sur je ne sais qu’elle traumatisme de l’histoire.

La Gauche Cactus

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 07:05
 
par Laurène Fauconnier - 23 Mai 2011

 

Elles sont Ukrainiennes, Roumaines ou Colombiennes, elles ont laissé mari et enfants au pays. En Italie, on les appelle les « badanti », « celles qui prennent soin ». Par centaines de milliers, elles s'occupent des personnes âgées dépendantes. Une immigration féminine sur un marché gris en pleine expansion qui touche également d'autres pays européens et qui résulte en partie des politiques publiques de prise en charge des personnes dépendantes.

 

 

 badanti

 

 

 

 

Traditionnellement en Italie, le soin aux personnes âgées relevait essentiellement des femmes de la famille. Au fil du temps, une prestation financière va être créée et amendée : l'Indennità di Accompagnamento. L'utilisation non contrôlée de cette allocation va favoriser l'émergence d'un marché pour le moins gris.

 

Les familles italiennes ont en effet recours à des immigrées. On estime leur nombre à environ 800 000, (elles seraient plus de 100 000 en Allemagne). Typiquement, la badante est originaire d'Amérique du Sud ou d'Europe de l'Est. Employée à plein temps, elle est logée dans la famille, présente 24h sur 24, 6 jours sur 7, moyennant un salaire compris entre 900 et 1200 euros, un revenu supérieur à ce qu'elle pourrait gagner dans son pays. Pour payer le salaire des badanti, les familles complètent l'indemnité perçue avec la pension de la personne âgée en y ajoutant éventuellement un complément d'origine familiale.

 

L'enquête menée par Barbara Da Roit et Blanche Le Bihan souligne que « Les tâches confiées aux badanti consistent à faire un peu de tout et à être là. On leur demande de faire une diversité de tâches qui vont de l'aide à la personne à l'aide ménagère, de l'administration de médicaments à la compagnie ». Cette externalisation de l'aide ne fait pas disparaître pour autant « l'aidant familial » qui conserve dans le dispositif un rôle essentiel. « S'il délègue une partie des soins, il se consacre aux tâches administratives, à la logistique, à l'organisation de l'arrangement d'aide et participe également aux soins quotidiens ». La familialisation des soins reste bien réelle en Italie.

 

Le plus souvent cette badante n'a pas de papiers ou n'est pas déclarée. Une solution infiniment plus « flexible » qu'en France où les bénéficiaires de l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA) sont obligés de déclarer leur aide. Par ailleurs, bien que non professionnalisées au soin des plus âgés, ces immigrées ne sont pas dépourvues de qualifications dans d'autres domaines. La loi de l'offre et de la demande conduit à orienter ces migrantes vers le marché gris de l'aide à la personne et à les faire travailler dans des conditions qui ne respectent pas la législation. De fait, en Italie, on leur attribue de plus en plus le monopole de ce secteur d'activité précaire et hors du marché légal du travail.

 

Régulièrement, l'Italie, tente de blanchir ce marché en régularisant ces immigrées devenues incontournables mais malgré des vagues de régularisation importantes (295 000 badanti ont demandé leur régularisation en Italie en 2009) le marché gris perdure.


L'Italie n'est pas seule dans cette situation. L'Allemagne et l'Autriche ont également un marché gris qu'investissent des migrantes en situation précaire. Face au vieillissement démographique et au coût croissant des dépenses de protection sociale, les Etats européens ont développé différentes politiques de prise en charge des personnes dépendantes aux effets contrastés.

 

Les politiques publiques d'aide aux personnes dépendantes

Barbara Da Roit et Blanche Le Bihan dans leur étude comparée des politiques publiques européennes (1), proposent la classification suivante : « le modèle scandinave, caractérisé par une obligation familiale minimale et un accès universel de services pour les familles ; un modèle libéral, le Royaume uni, caractérisé par une prévalence du marché comme réponse aux risques sociaux ; un modèle familialiste des pays du Sud qui correspond donc à l'ltalie où traditionnellement les tâches de « care » relèvent de la famille et non de l'Etat ; et un modèle mixte dit continental dans lequel on trouve la France, l'Allemagne et l'Autriche avec des obligations familiales plus limitées et une offre de service en fonction de la situation des familles. »

 

En Italie, l'Indennità di Accompagnamento crée dans les années 80 est uniforme, 472 euros par mois en 2009, elle est attribuée sans conditions de ressources, 10% des Italiens de plus de 65 ans en bénéficient. C'est une compensation financière aux familles, d'ailleurs considérée comme un revenu supplémentaire, dont l'utilisation n'est pas contrôlée.

 

En France, on crée dans les années 90 la prestation spécifique dépendance puis en 2002 l'APA. Son versement et son ampleur dépendent des niveaux de dépendance et de revenus. Elle est versée pour financer un plan d'aide précis, détaillé et contrôlé. L'APA est étroitement liée à la politique de l'emploi, il s'agit de développer le secteur des services à la personne dans une logique de « défamilialisation » des soins. Dans les cas français et italien, le dispositif spécifique prévu pour les personnes âgées est du « cash for care », une allocation pour aider aux soins. Ce système va également se développer ailleurs en Europe mais en complément d'autres dispositifs préexistants.

 

Historiquement, les Länder allemands partageaient avec les familles la charge des soins aux personnes âgées par un système de subvention. L'évolution démographique conduit à créer une assurance-dépendance en 1994. Peuvent en bénéficier les personnes les plus dépendantes et ceci indépendamment de leurs ressources. Elles peuvent dès lors faire appel à des services publics ou préférer une allocation variant de 275 à 675 euros selon le degré de dépendance et se tourner vers les aides privées de leur choix sans qu'aucun contrôle ne s'exerce sur la manière dont l'allocation est utilisée.

 

Au Danemark, dans les années 60 un système d'assurance collective obligatoire est mis au point. Il est destiné à couvrir la dépendance en offrant aux familles des services et des résidences financées par l'Etat. Un système d'allocation est créé dans les années 90 pour développer des formes d'aide privée, plus souples et moins coûteuses pour l'Etat.

 

En Suède dès les années 50, c'est l'impôt qui finance l'intégralité de la dépendance. Le système va évoluer dans les années 90 en étant décentralisé au niveau municipal et au fil des années en limitant son « universalisme » aux personnes les plus âgées et les plus dépendantes. Des allocations vont être offertes pour aider les familles à financer des aides. De plus, dans ces pays scandinaves la formation et la qualification des personnels en charge des plus âgés est largement développée et depuis longtemps.

 

(1) Barbara Da Roit et Blanche Le Bihan

Lien social et Politiques, 62, Vieillir pose-t-il vraiment probème ? Automne 2009, pages 41 à 55

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 07:03
 
par Claude Emmanuel Triomphe - 23 Mai 2011

 

Cet - couleur

New York, Cannes, Londres, Paris, Berlin, Madrid, leurs grand hôtels, leurs femmes de chambre, souvent immigrées. Il n’est pas courant que celles-ci fassent la une des médias. Pour ce qui est de New York, no comment. Il nous semble par contre que la situation de ces femmes est emblématique de notre système – où les plus pauvres servent les plus riches – et nous ramène à ce que sont nos sociétés, à celles et ceux qui les composent, à leur cohésion. L’Europe toute entière vit aujourd’hui dans la schizophrénie : beaucoup de pays s’engagent ou voudraient s’engager sur une réduction drastique de l’immigration en durcissant notablement les conditions d’entrée et de travail.

 

 

 

 

Ils vont même jusqu’à externaliser nos frontières et déléguer à certains – la Lybie il y a peu de temps encore ! -  la régulation de flux migratoires. Mais ces mêmes pays se heurtent frontalement aux pénuries de main d’œuvre et au vieillissement démographique. En outre, les difficultés économiques et sociales alimentent une rhétorique qui oppose celles et ceux d’ici à celles et ceux de là-bas sur fond d’incivilités et d’insécurités perçues comme croissantes. Et qui tend à propager la croyance selon laquelle ceux d’ici vivraient mieux si le flot des autres diminuait. Enfin les politiques de répression – dont le bilan négatif est désormais attesté par tous les chiffres - prennent le pas sur celles, souvent fragiles et moins bien dotées, qui voulaient favoriser la cohésion et l’intégration.

 

En matière d’intégration, concept aujourd’hui si vivement débattu et vocable très français, l’Europe s’est dotée d’un indice qui passe en revue de très nombreux critères culturels, linguistiques, sociaux, économiques et politiques. Le classement établi met en tête la Suède (encore une fois). Et pourtant. Les chiffres suédois du chômage comme le résultat des dernières élections avec l’entrée des populistes montrent que sous l’indice se cache une réalité bien plus nuancée. Ailleurs. David Cameron, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel se retrouvent pour proclamer que le multiculturalisme est un échec. Cet échec, pour autant qu’il soit avéré, engendre potentiellement divers types de réponses. Mais seule l’une d’elle semble aujourd’hui privilégiée par des gouvernements prisonniers du populisme et du court-termisme ambiants, dépourvus d’une vision à long terme de la cohésion sociale. Il faut durcir, dit-on, les conditions d’entrée, de séjour et de travail.  Il faut établir un équilibre ajoute-t-on encore entre droits et devoirs. En sous entendant comme au Danemark, que les droits seraient abusifs et les devoirs bien maigres. Mais dans nombre de pays, ces droits ne sont pas au rendez-vous. Les discriminations sont parfois féroces, notamment en France. Le simple fait d’avoir voté une loi portant création du CV anonyme l’atteste ; et son absence de mise en œuvre en dit long sur les pesanteurs de tous ordres.

 

 Le tout répression, on le voit en matière de sécurité publique comme en matière de travail illégal, nous a conduits dans l'impasse. Il renforce paradoxalement les situations illégales en ne leur offrant plus d'issues, et  n'inquiète pas, s'agissant du travail au noir, ceux qui y ont recours. En d'autres termes il consolide l'illégalité et les situations infra humaines plus qu’il ne les combat. Enfin, et l’exemple italien des Badanti, ces femmes employées dans des travaux domestiques en Italie, est éloquent : qui viendra demain rendre service au 3e et au 4e âge, pour ne pas parler du premier ? Il n’est que d’y penser pour savoir que le développement des services à la personne passe par un développement de l’immigration mais aussi de l’intégration à tous niveaux. Prétendre l’inverse ne peut relever que de la démagogie.

 

Pouvons-nous revenir en arrière, vers des sociétés plus homogènes, et en quelque sorte, nous dé-mondialiser ? Cette illusion du moment gagne du terrain. Pourtant c’est ailleurs qu’il nous faut, sans angélisme ni naïveté, aller. Ce sont nos mécanismes d’intégration qu’il faudrait réexaminer, réformer et transformer. Et la sphère du travail qui est chère à Metis ne peut échapper à l’examen. Peut-on par exemple en matière de travail illégal se contenter d’une politique répressive sans penser une politique intégrative ? Peut-on en matière de démocratie sociale et politique se satisfaire d’un décalage aussi criant entre les représentants et les représentés ? Quid des politiques de promotion sociale et quid de l’impact effectif des chartes de la diversité adoptées ces dernières années par de nombreux grands groupes ? Quid enfin de nos politiques éducatives et ce de l’enseignement primaire jusqu’à la formation professionnelle voire la formation syndicale ?

 

A l'évidence ceci touche tout notre continent. Même les pays d’émigration – l’Irlande hier, les pays d’Europe de l’Est aujourd’hui - se confrontent désormais à des questions d’immigration et à un devenir pluri ethnique. Au fond nous pensions que l’intégration de tous passait par la désintégration de certains. C’est ce postulat qui est aujourd’hui en échec, bien plus que le concept d’intégration qui garde toute sa noblesse, pourvu que nous sachions le refonder au vu de l’expérience comme des défis qui sont devant nous.

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24 mai 2011 2 24 /05 /mai /2011 11:09

 

Libye: trois morts et 150 blessés dans des raids de l'Otan

Au moins trois personnes ont été tuées et 150 blessées dans de violents raids de l'Otan sur Tripoli mardi à l'aube, selon le gouvernement libyen, tandis que Washington a appelé le colonel Kadhafi à prendre le chemin de l'exil.

 

«Selon les informations dont nous disposons il y a trois morts et 150 blessés», a déclaré le porte-parole du gouvernement libyen, Moussa Ibrahim à des journalistes à bord d'un bus les conduisant peu après les bombardements vers un hôpital de la capitale. Il a ajouté que l'Otan avait mené «entre 12 et 18 raids contre une caserne de la garde populaire», des unités de volontaires qui épaulent l'armée. La majorité des victimes sont des civils habitant à proximité, selon lui.

 

Les raids qui ont commencé vers 1h du matin (heure locale) ont duré plus d'une demi-heure et ont visé le secteur de Bab Al-Aziziya, résidence de Mouammar Kadhafi.

Paris et Londres annonce l'envoi d'hélicoptères

Par ailleurs, Paris et Londres ont annoncé l'envoi d'hélicoptères pour des frappes au sol «plus précises». La France va envoyer des hélicoptères de combat, a annoncé le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé. «Les Britanniques, qui ont des moyens comparables aux nôtres, vont aussi s'engager» dans cette voie, a indiqué à Bruxelles le ministre de la Défense, Gérard Longuet.

 

Jusqu'à présent, seuls des avions -avec ou sans pilotes- ont mené les attaques de la coalition, mais ils ne parviennent plus à viser de nombreux chars ou troupes, car trop proches de populations civiles.

Paris avait déjà dépêché, la semaine dernière, un navire de guerre français de type Mistral combinant notamment les fonctions de porte-hélicoptères, de transport de troupes et de mise en oeuvre de moyens d’assaut amphibie et de commandement. «Il ne s'agit pas d'un changement de stratégie. Il s'agit toujours d'affaiblir les moyens militaires de Kadhafi», précise Juppé, selon lequel les appareils ne serviront (...) Lire la suite sur Liberation.fr

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24 mai 2011 2 24 /05 /mai /2011 11:07
Nouvelle manifestation contre les restructurations

mardi 24 mai 2011, par Frédéric Dayan

 

A l’appel de l’Union syndicale CGT de l’Assistance Publique des hôpitaux de paris ont manifesté lundi devant le siège du groupe hospitalier public, pour protester contre son plan de restructuration prévu sur quatre ans.

 

Les manifestants, réunis à l’occasion d’un comité technique d’établissement central (CTEC) exceptionnel consacré à la mise en oeuvre au plan stratégique 2010-2104, ont réclamé le maintien de tous les services et de tous les postes. _ Lors de cette réuinon, 35 projets ont été présentés dans le cadre du plan stratégique de l’AP-HP qui prévoit le regroupement de 37 établissements en 12 groupes hospitaliers. Cette restructuration s’est traduite jusqu’ici par la suppression d’un millier de postes non soignants par an.

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24 mai 2011 2 24 /05 /mai /2011 11:01

 

8 mai : ne pas oublier Sétif

 

auteur

Olivier Le Cour Grandmaison est un universitaire français né le 19 septembre 1960 à Paris. Historien spécialiste des questions de citoyenneté sous la Révolution française et des questions qui ont trait à l’histoire coloniale, il enseigne les sciences politiques à l’université d’Evry-Val d’Essonne ainsi qu’au Collège international de philosophie.

 

résumé

Le jour marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale est aussi celui où l’État français a réprimé dans le sang l’une des premières manifestations pacifiques pour l’Algérie libre. Un passé toujours occulté.

à propos

Cet article a été publié le 14 mai 2009 sur le site du journal "Politis" qui nous a aimablement autorisé à le republier.

 

citation

Olivier Le Cour Grandmaison, "8 mai : ne pas oublier Sétif", Recueil Alexandries, Collections Reflets, juin 2009, url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article897.html

 

8 mai 2009. La France célèbre, comme il se doit, la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe. 8 mai 2009. L’Algérie commémore le soixante-quatrième anniversaire des massacres de Sétif et de Guelma perpétrés par l’armée française et de nombreuses milices coloniales composées de civils d’origine européenne. Bilan : Entre 20 000 et 30 000 victimes arrêtées, torturées et exécutées sommairement pour rétablir l’ordre imposé par la métropole et terroriser de façon durable les populations « indigènes ». Une seule et même date. Deux histoires diamétralement opposées en même temps que liées l’une à l’autre ; pour recouvrer son autorité en Europe et dans le monde, la France libre est prête à tout pour défendre l’intégrité de son empire. Ainsi fut fait. En métropole donc et pour les colons des différents territoires d’outre-mer, la joie de la paix, de la liberté et de la démocratie retrouvées. Pour les « musulmans », l’horreur, le sang et les larmes provoquées par le déchaînement de la violence d’État destinée à perpétuer l’oppression et l’exploitation coloniales.

 

De quoi étaient donc « coupables » les « indigènes » ? D’avoir osé manifester pacifiquement, en ce mardi 8 mai 1945, dans la rue principale de Sétif, pour exiger la libération de Messali Hadj, défendre « l’Algérie libre » pour laquelle ils ont conçu un nouveau drapeau, symbole de leur lutte pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et pour l’indépendance. C’est à cela que s’oppose la France afin de perpétuer sa domination imposée depuis cent quinze ans. Monarchique d’abord, républicaine ensuite, impériale après, et de nouveau républicaine après la chute de Napoléon III, la métropole a longtemps soumis, comme l’écrivait Ferrat Abbas, les « Arabes » au régime du « talon de fer » et du « mépris », au Code de l’indigénat, voté par la Chambre des députés le 28 juin 1881, aux tribunaux répressifs, à l’internement administratif et aux amendes collectives. Celles-là mêmes qui, massivement appliquées pour sanctionner les tribus kabyles soulevées en 1871, avaient précipité leur ruine pour de longues années. Sans oublier les nombreux massacres commis par l’armée d’Afrique pour conquérir l’Algérie, la « pacifier » comme on disait déjà au XIXe siècle, et rétablir l’ordre colonial lorsque celui-ci était contesté par les « indigènes. » Jusqu’en 1945, ces derniers n’étaient que des « sujets français », des assujettis en fait comme en droit, privés des libertés démocratiques élémentaires. À cela s’ajoutent de nombreuses dispositions discriminatoires et racistes qui ne pesaient que sur eux.

 

Telle était donc la situation de ces « populations » comme on disait alors. C’est contre cet ordre pour eux dictatorial, injuste et inégalitaire que manifestent donc ceux qui se rassemblent à Sétif ce 8 mai 1945 puis le soir même à Guelma. On connaît la suite : le déchaînement de la violence et de la terreur d’État avec son cortège de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Oubliés les principes qui, quelques semaines plus tard, allaient être au fondement de l’article 1er de la Charte des Nations unies, adoptée le 26 juin 1945, établissant le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Oubliés aussi les engagements, contractés dans la Résistance, puis inscrits dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui affirme : la France, « écartant tout système de colonisation fondé sur l’arbitraire », garantit à « tous […] l’exercice individuel ou collectif des droits et libertés proclamés ou confirmés » dans le présent texte. Oubliés enfin les fondements philosophiques, politiques et juridiques, plus tard sanctionnés par la Déclaration universelle des droits de l’homme, votée par l’Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948 à Paris, et son article 2 relatif aux droits dont « chacun peut se prévaloir » sans « distinction de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion et d’opinion politique ».

 

Dans les colonies de la France républicaine, ces principes ne s’appliquent pas. Étrange conception de l’universel qui n’a d’universel que le nom puisque les prérogatives mentionnées ne valent ni pour tous les hommes, ni pour tous les lieux, ni pour tous les temps. Les massacres de Sétif et de Guelma en témoignent sinistrement : une fois encore, la force a primé les droits, aussi fondamentaux soient-ils, dès que le visage de l’Autre épouse les traits du « musulman » ici, du « Noir » ailleurs et de « l’Indochinois » bientôt. Une fois encore, en ce mois de mai 2009, ce passé n’a toujours pas droit de cité, ni dans les discours des plus hauts responsables de l’État, ni dans la plupart des grands médias français. Mépris, silence, oubli. Pour combien de temps encore ? *Dernier ouvrage paru : La République impériale : politique et racisme d’État, Fayard, 2009.

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24 mai 2011 2 24 /05 /mai /2011 10:50
 

 

 

 

Rencontre Inter-laboratoires du CIEN À LYON

CENTRE INTER-DISCIPLINAIRE SUR L’ENFANT - CHAMP FREUDIEN    
    

Vendredi 17 juin 2011 à 21h

 

 

École Santé Social Sud-Est -ESSSE
       
             

Je m’attache, tu décroches, nous nous accrochons

 

 

 

 

 
  

Conversation interdisciplinaire

animée par Marie Cécile Marty, psychologue.

 
   
 

 

 

 

Invités :

Jacqueline Dhéret, psychanalyste : « Léa, la petite voleuse ».

Gaël Gratet, professeur de français : « Atomes crochus ».

 

La théorie de l’attachement (J. Bowlby, années 50), revue et corrigée en termes comportementalistes, a

pour principe l’idée « qu'un jeune enfant a besoin, pour connaître un développement social et émotionnel

normal, de développer une relation d'attachement avec au moins une personne qui prend soin de lui de

façon cohérente et continue » : un « caregiver ». On le voit, la notion actuelle de « care » dérive de celle

d’attachement : « je prends soin de toi, tu t’attaches » serait la formule initiale de cette logique. Alors

quand « tu décroches », suffirait‐il que « je m’ttache à toi par le « care » ? Il n’n n’st rien et l’ccroche (à

plus d’n sens), l’ccroche d’n sujet au savoir, par exemple, passe par des voies énigmatiques comme le

symptôme. N’n déplaise à Rousseau, nous ne nous accrochons pas à tout, et ce n’st pas par un

attachement établi mais plutôt par un ça ne va pas singulier que le sujet entre dans le lien à autrui. Que

nous enseigne de cette « accroche » nos expériences pluridisciplinaires ?

  

 
 

Renseignements : Idriss Oubaïd 04 78 17 24 15 Michèle Rivoire 06 80 96 30 15

 

 

 

 

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